Zazie

L’envie d’oser

Après l’arrêt brutal de sa tournée précédente, l’Essenciel Tour, pour cause de pandémie le 11 mars 2020, Zazie reprend enfin la route après plus de 3 ans d’abstinence scénique. Et comme elle l’avait fait en mars 2019 avec ses « Préliminaires », la patronne de la chanson française s’est offert 3 soirées intimistes en mode « before » , les 19, 20 et 21 mai, avant son « Air Tour » qui a débuté à Antibes le 2 juin. Au lieu de multiplier encore les lieux, c’est à la Maroquinerie, dans le 20e arrondissement de Paris qu’elle a suspendu son vol pour le plus grand plaisir de ses fans, venus fidèles, célébrer son before. Nous ne pouvions pas rater ce retour à la scène de cette artiste unique qui a su fédérer plusieurs générations sans faire de compromis ni rechigner sur les difficultés. C’est sans doute là, que réside la plus grande force de Zazie : jeter ses couronnes de lauriers et oser. Oser encore et encore, pour nous offrir un premier tour de chant qui n’a pas manqué d’airs…

Certains ont attendu depuis plusieurs heures que les portes de la petite salle de l’Ouest parisien s’ouvrent, pour mieux se retrouver au plus proche de leur patronne, Zazie. Elle est l’une des rares artistes françaises à couvrir de tubes plus de 3 décennies, autant de générations, conservant à la fois son écriture si personnelle sociétale, frontale et poétique, tout en renouvelant sans cesse une certaine idée de la chanson française, profonde et mélodique à la fois. Et elle le prouve encore avec ce pari osé que représente « Aile-P » qui en a surpris plus d’un, tant son format hybride a dérouté : maxi-single ou album? Plutôt la face A d’une face B promise et à venir.

Osé, comme toujours avec Zazie qui de projets en projets se réinvente, quand par exemple (à l’inverse de ce court « Aile-P »), elle sort en 2010, 42 titres d’un coup (accompagnés de 7 vidéos) avec le projet « Za7ie » (Méga-album ou coffret de 7 mini-lp ?) ou encore, quand elle accompagne son album « Rodéo » (2004) de l’intégralité des titres en clips videos formant un moyen métrage (tourné en Inde).

Si elle est surnommée à juste titre « la patronne » dans le métier comme auprès de ses fans, c’est que malgré tous ces risques, elle reste au sommet d’une chanson francophone qui n’a pourtant de cesse de révéler de façon exponentielle de nouveaux venus, maladivement surnommés à leur insu et les desservant assurément ‘la nouvelle X » ou « le nouveau X » sans que jamais jusqu’à présent, on ne nous ait présenté de « Nouvelle Zazie ». La patronne règne encore, quoi qu’on en dise !

C’est sans doute cette envie d’oser sans cesse, qui a poussé Zazie à revenir à son essentiel avant d’affronter les Zénith et les festivals, dans cette « Maroquinerie » qui accueille moins de 500 personnes. Cette salle, qui a vu défiler de grands artistes, elle l’a souhaitée pour retrouver le goût des premières fois.

C’est aussi cette envie d’oser qui lui a fait préférer des titres plus âpres (au choix, la surprise avec « Où allons-nous? », le très beau « Les contraires » ou encore en rappel : « Ça ») aux tubes attendus de ses 3 premiers albums (on aura attendu « Zen », « Larsen », “Tout le monde » ou même « J’envoie valser » en vain) qui aurait généreusement rempli ce tour de chant et déchaîné les foules.

Le ton est ainsi donné dès la première partie du concert qu’elle consacre principalement à « Aile-P » (dont elle chantera 6 des 8 titres de l’opus). C’est en coulisses qu’elle entame « Ça commence », magnifique chanson taillée pour elle et qui ouvre cet album (bien à propos sur la vie et les doutes d’une artiste qui part en tournée) pour entrer dans la lumière et avancer humblement au milieu de la scène, portée chacun des 3 soirs par un public fidèle et dévoué : ambiance assurée pour une Zazie souvent émue et constamment reconnaissante, qui n’hésite pas à échanger et interroger son audience acquise. Suivent « Couleur » et « Lève-toi » (de ce même « Aile-P ») avant le dispensable « Petroleum » (seul titre de « Encore heureux », 2015) puis vient le premier le tube, l’un de ses plus gros à ce jour : « Speed » (« Essenciel », 2018 – ndlr: chanté en 2e le premier soir) avant une première accalmie avec « Où allons-nous ? » (extrait de « Cyclo », 2013)

Elle reprend de plus belle avec « J’étais là », toujours aussi puissant et efficace, l’un des 4 titres choisis pour faire la part-belle à l’album « Totem » (2007) et enchaîne avec « Les contraires » (de « Cyclo ») avant de remettre « Aile-P » à l’honneur avec le jouissif et libérateur « Gilles » suivi de l’aérien « Gravité ».

C’est là que le concert prend un tournant, celui des tubes et des bonnes surprises avec « Je suis un homme », son plus gros tube à ce jour, suivi de « La dolce vita », affectionné par le public qui ouvre « Rodeo » et avec le très surprenant « Va chercher » (extrait de l’album « Essenciel ») où Zazie se paie chacun des 3 soirs un bain de foule dans l’hystérie générale. Dernière grosse surprise : « Les poupées Zarbie » (extrait de « Za7ie »).


Le bouquet final de ces retrouvailles réussies se compose des très attendus « Rue de la Paix » (le titre le plus ancien de cette setlist osée, datant de 2001, extrait de « La Zizanie ») et « Rodeo » (2004) puis en guise de rappel, de « Let it Shine » (le tube de « Aile-P ») et « Des rails » (extrait de « Totem ») qui déchaînent le public une dernière fois avant de conclure avec le très apprécié « Oui » (extrait de « Rodeo ») et le très émouvant (et très inattendu) « Ça » (extrait de « Totem ») qui viendra faire oublier le rituel final de « J’envoie valser ».

Après ce tour de chant, c’est un pari gagné pour Zazie qui a, depuis, entamé sa tournée à Antibes le 2 juin dernier, ne changeant rien – ou si peu – à cette setlist audacieuse testée à la Maroquinerie, ne rajoutant aux 20 titres proposés durant ces 3 soirées privilégiées, que « Chanson d’amour » (de « Za7ie ») et « Chanson d’ami » (de « Made in Love », 1998, maigre consolation de la trilogie oubliée).

En tournée cet été, Zazie sera au Zénith de Paris le 13 octobre prochain. D’ici là, peut-être que la face B de « Aile-P » sera révélée et rejoindra une setlist qui n’a pas manqué d’airs…

Gregory Guyot

Setlist : Ca commence / Couleur / Lève-toi / Petroleum / Speed / Où allons-nous / J’étais là / Les contraires / Gilles / Gravité / Je suis un homme / La dolce vita / Va chercher / Les poupées Zazie / Rue de la Paix / Rodeo / Rappel : Let it shine / Des rails / Oui / Ca

Photos : Gregory Guyot (DR / JSM) / Delphine Champion (DR)

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