L’interview « à livre ouvert »
de KENT
Après une tournée célébrant ses 40 ans de carrière, la publication d’un roman (« Peine perdue ») et d’une bande dessinée consacrée à Elvis Presley, l’ex-leader du groupe culte Starshooter, parolier du tube « Juste quelqu’un de bien » pour Enzo Enzo, également à la tête d’une série de tubes personnels dans les 90’s (« J’aime un pays », « Tous les mômes »), avait envisagé de poser ses valises et de faire une pause dans sa foisonnante carrière d’artiste protéïforme par excellence, entre musique, dessin et littérature. C’était compter sans le Covid19 et le confinement qui ont eu raison de ses (bonnes ?) résolutions : histoire de tromper l’ennui et la déprime ambiante, il s’est ainsi remis à la guitare pour mettre en musique d’anciennes bribes de textes issues de son « cahier à brouillons », alors que des chansons toutes neuves jaillissaient aussi de sa fertile imagination. Au point de disposer au final de suffisamment de titres pour constituer un nouvel album, « Scherzando », qu’il a eu envie d’enregistrer dans une formule résolument Pop, avec un tandem de musiciens proches, Marc Haussmann et Alice Animal, dans le petit studio Audioscope à Paris. Mis en boite en une semaine, dans les conditions du Live, ce nouvel opus (son 16ème en solo) composé de onze titres de belle facture, entre ombre et lumière, vient nous rappeler combien la voix chaude et amicale de Kent nous est familière et réconfortante, tout autant que son regard humaniste et poétique sur le monde qui l’entoure. Nous avons saisi cette occasion pour parler de livres, avec cet éternel amoureux de la belle écriture, dont les nouvelles chansons confirment combien l’ élégant chanteur sait manier la plume comme personne …
– Enfant, quel est votre premier souvenir de lecture ?
Le Journal de Mickey, que ma grand-mère m’achetait tous les jeudis.
– Le dernier livre que vous avez acheté ?
Nous d’Evgueni Zamiatine. Écrit en 1920, ce roman de SF russe a sans doute inspiré Le meilleur des mondes à Aldous Huxley et 1984 à George Orwell. Il a été censuré en Russie à sa sortie et Zamiatine a été persécuté par le pouvoir qui s’est reconnu dans ce conte futuriste délirant.
– Le dernier livre que vous avez aimé / offert ?
C’est une BD, La bibliomule de Cordoue. C’est une fable drôle et très pertinente sur le savoir et la censure.
– Le dernier livre qu’on vous a conseillé ?
Le mage du Kremlin de Giuliano Da Empoli. Un excellent livre ! Je le conseille vivement à mon tour.
– Votre livre de chevet ?
Je n’en ai pas. Ou alors une aventure de Tintin quand je ne sais pas quoi lire en allant me coucher. Je les parcours toujours avec plaisir.
– Celui que vous n’avez jamais réussi à terminer ?
Ulysse de James Joyce.
-Êtes vous amateur de biographies de célébrités ? laquelle par exemple ?
J’en lis quelquefois. En ce moment, je lis celle de Peggy Guggenheim, écrite par Véronique Chalmet. C’est savoureux.
– Votre genre de livres préféré (policier, roman, SF, philosophie, BD…) ?
La SF, mais pas n’importe laquelle. Un bon livre de SF doit être inventif, philosophique et surtout, être aussi de la littérature.
– Votre endroit favori pour lire ?
Le train et le lit.
– Êtes vous plutôt papier ou numérique ?
Papier, sans hésitation.
– Plutôt plusieurs livres en parallèle ou un seul à la fois ?
Un seul à la fois. Je n’aime pas m’éparpiller en lecture.
– Plutôt Fnac/Amazon ou libraire de quartier ? Une adresse à conseiller en particulier ?
Plutôt librairie de quartier. J’adore me promener dans les rayons même si je n’achète rien. C’est tellement plus agréable que de cliquer sur des sites. J’habite Champigny, je me fournis en livres à L’Instant Lire. C’est un acte militant pour que cette librairie perdure dans cette banlieue. De plus, ils font un excellent travail.
– Quel est votre écrivain classique préféré ?
Maupassant.
– Votre philosophe préféré ?
Bruno Latour, que j’ai découvert peu avant sa mort.
– Votre poète préféré ?
Boris Vian, parce qu’il m’a donné envie de m’y frotter sans vergogne.
– Votre dramaturge préféré ?
Kurt Weill.
– Votre romancier contemporain préféré ?
Jean-Paul Dubois ou Hervé Le Tellier. Ça dépend du jour.
– Votre dessinateur BD préféré ?
Charles Berberian, sans hésitation.
– Votre héros/ héroïne de la littérature préféré(e) ?
Je n’en ai pas. J’adore Le cycle de la Culture, une série de SF écrite par Iain M.Banks malheureusement décédé. Son « héros » est une civilisation avancée libertaire et hégémonique à la fois.
– Plutôt J.Paul Sartre ou Albert Camus ? Un titre ?
Pas plus l’un que l’autre. Je ne les ai pas assez lus pour les départager.
– Plutôt Françoise Sagan ou Marguerite Duras ? Un titre ?
Idem. Quoique j’ai un faible pour Duras.
– Plutôt Guillaume Musso ou Marc Lévy ?
Jamais lus.
– Qu’aimeriez-vous demander à Amélie Nothomb si vous deviez diner en tête à tête ?
Puis-je garder mon chapeau ?
– Et à Bernard-Henry Levy ?
Pourquoi êtes-vous si mondain?
– Quel est le poète dont vous aimeriez mettre en musique un texte ? Un poème en particulier ?
J’ai eu envie de mettre en musique les poèmes de Houellebecq, mais Jean-Louis Aubert m’a grillé au poteau. Dommage.
-Quel est votre film préféré adapté d’un roman ?
La nouvelle vie de Paul Sneijder est une adaptation tout à fait réussie du livre de J.P Dubois.
– Avez-vous commencé l’écriture d’un nouveau roman ? Si oui, quel en est le thème ?
Non, je n’ai rien commencé à écrire. J’en suis encore à me le raconter intérieurement.
– Tenez-vous un journal intime ?
Ça m’est arrivé, mais c’est trop fastidieux. Je prends des notes pendant des voyages. Le problème du journal intime, c’est qu’on est tenté de vivre des choses pour avoir à les raconter. Ça fausse la réalité.
– Si vous deviez publier une autobiographie, quel en serait le titre ?
À suivre.
Propos recueillis par Eric Chemouny
Photos : Gaelle Astier-Perret (DR)
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