L’interview « à livre ouvert »

de FLORENT MARCHET 

Figure prometteuse de la nouvelle scène française au début des années 2000, avec les éblouissants albums « Gargilesse » et « Rio Baril », Florent Marchet est depuis reconnu comme une des artistes les plus exigeants, inclassables, et productifs de sa génération. En témoignent encore le souvenir de sa participation au projet musical collectif « Frère animal », aux albums de Sylvie Vartan, Clarika, Axelle Red, Calogero, ou Bénabar, mais aussi ses innombrables contributions au monde du cinéma, du théâtre ou de la littérature… 8 ans après la sortie de son dernier album « Bambi Galaxy », unanimement salué par la presse, il est de retour avec « Garden Party » (sortie le 10 juin 2022), un nouvel opus de 13 titres exclusivement enregistrés dans son propre studio avec l’ingénieur du son Loris Bernot, comptant notamment un duo avec PR2B, et sur lequel s’expriment avec une modernité intacte son sens de l’observation de ses contemporains, sa poésie fulgurante, sa douce ironie désabusée et plus que tout, son goût pour l’écriture juste et ciselée : à cette occasion, et alors qu’il sera prochainement de retour sur scène (le 8 novembre 2022 au Café de la Danse à Paris et le 2 février 2023 à la Cigale) nous avons soumis notre interview « À livre ouvert » à cet éternel amoureux des livres et des belles lettres…

– Enfant, quel est ton premier souvenir de lecture ?

Une histoire de galette qui se sauve dans la forêt, un grand classique assez effrayant. Roule Galette quoi !

– Le dernier livre que tu as acheté ?

Vanessa Schneider, « La fille de Deauville », sur la traque d’Action directe ou comment peut-on faire des horreurs et des confitures. Attention, il s’agit là d’un roman, pas d’une biographie. Une œuvre littéraire à part entière. Assez fou de réalisme.

– Le dernier livre que tu as aimé / offert ?

J’ai adoré « Rabalaïre » d’Alain Guiraudie, dont l’écriture et les beaux excès romanesques me fascinent depuis le premier roman. Mais il fait plus de 1200 pages. Alors j’offre davantage du Arnaud Cathrine et du Nicolas Mathieu, deux écrivains qui comptent beaucoup pour moi et qui continuent de m’accompagner une fois le livre refermé.

– Le dernier livre qu’on t’a conseillé ?

On a insisté grandement pour que je lise « Feu » de Maria Pourchet. J’ai lâché le livre au bout d’une centaine de pages. Personnages assez détestables. Mes amis ont de nouveau insisté pour que je reprenne ma lecture. J’ai recommencé. Je suis cette fois allé au bout. Verdict : c’est un grand roman !

-Ton livre de chevet ?

Ma table de chevet subit ce terrible mal de notre époque :  le Tsundoku.

– Celui que tu n’as jamais réussi à terminer ?

Je laisse toujours la chance à une centaine de pages avant d’abandonner un livre. Parfois à tort mais c’est rare. Et puis il y a des surprises : « Microfictions » de Régis Jauffret que j’aime pourtant beaucoup. J’en ai lu une grande partie (le livre compte 500 nouvelles) puis j’ai laissé tomber, lassé.

– Es-tu amateur de biographies de célébrités ? laquelle par exemple ?

Oui, tout ce qui concerne Paul McCartney. Le dernier en date : Paroles et souvenirs de 1956 à aujourd’hui.

– Ton genre de livres préféré (policier, roman, SF, philosophie, BD…) ?

Roman et roman graphique. Essais de sociologie.

– Ton endroit favori pour lire ?

Quand c’est été, dehors, allongé sur un muret à l’ombre. Sinon toute l’année dans mon canapé.

– Es-tu plutôt papier ou numérique ?

Papier.

– Plutôt plusieurs livres en parallèle ou un seul à la fois ?

Un seul quand le roman me fascine mais s’il m’ennuie, je lis une bio ou un essai en parallèle.

– Plutôt Fnac/Amazon ou libraire de quartier ? Une adresse à conseiller ?

Libraire. Mon ami David de la Librairie du marché à Deauville.

– Quel est ton écrivain classique préféré ?

Carver, c’est un classique maintenant non ?

– Ton philosophe préféré ?

Ma femme. Elle a détrôné le Spinoza de mes années lycée.

– Ton poète préféré ?

Aragon.

– Ton dramaturge préféré ?

Rodrigo Garcia.

– Ton romancier contemporain préféré ?

Trop difficile et trop fluctuent. Allez, pas de jaloux : Laura Kasischke.

– Ton dessinateur BD préféré ?

Pareil. Trop difficile. Ou alors Pierre La police parce que j’ai un original de cet original chez moi.

-Ton héros/ héroïne de la littérature préféré(e) ?

Je ne suis pas vraiment fasciné par les héros en littérature.

– Plutôt J.Paul Sartre ou Albert Camus ? un titre ?

Difficile. J’aime le philosophe Sartre et l’écrivain Camus. Et puis un homme, ça s’empêche aussi de trancher. J’ai quand même beaucoup aimé « Les Mots » quand j’étais ado.

– Plutôt Françoise Sagan ou Marguerite Duras ? Un titre ?

Un peu de soleil dans l’eau froide au cœur d’un Été 80 de Marguerite Sagan.

– Plutôt Guillaume Musso ou Marc Lévy ?

Je ne connais pas, désolé. Et pourtant je prends beaucoup le train.

– Qu’aimerais-tu demander à Amélie Nothomb si vous deviez diner en tête à tête ?

Quand je l’ai rencontrée, j’ai oublié de lui demander des conseils pour travailler la mémoire. Le poisson rouge que je suis aurait tellement aimé être hypermnésique comme le poisson noir.

– Et à Bernard-Henry Levy ?

Sommes-nous bien d’accord qu’absolument tout est politique, à commencer par le poulet du dimanche ?

– Quel est le poète dont tu aimerais mettre en musique un texte ? Un poème en particulier ?

J’ai mis en musique beaucoup de poètes.  Il y a notamment eu plusieurs spectacles avec Patrick Mille sur le thème de Relire : Relire Aragon, puis Perros ou encore Reverdy. C’est sans fin, j’adore ça et quand je lis de la poésie, je ne peux pas m’empêcher d’aller au piano.

– Quel est ton film préféré adapté d’un roman ?

« Soleil Vert ». Un chef d’œuvre du cinéma dystopique. Je n’ai pas lu le livre. On dit souvent qu’un mauvais livre fait un bon film et vice-versa.

– As-tu commencé l’écriture d’un nouveau livre ? Si oui, quel en est le thème ?

Oui mais ça porte malheur d’en parler. Bien tenté quand même.

– Tiens-tu un journal intime ?

Non, mais c’est un regret.

– Si tu devais publier une autobiographie, quel en serait le titre ?

« Aucun intérêt ».

Propos recueillis par Eric Chemouny

Photos : Charlotte Lesquerre (DR)