ANGÈLE
face à son miroir
L’an dernier à Montréal, alors que son album « Brol » n’était pas encore sorti, nous avions découvert en Live la prometteuse Angèle lors d’un showcase SACEM et en premières parties. Un an plus tard, c’est en véritable star qu’elle est revenue chanter au Québec, dans le cadre des 31èmes Francos, en plein coeur de sa gigantesque tournée d’été, passant aussi par les Francofolies de La Rochelle, où nous l’avons retrouvée. Malgré le rythme effréné qui est désormais le sien, elle a pris le temps de regarder dans le rétroviseur pour revenir, avec beaucoup de lucidité et de maturité, sur une année dingue, dingue, dingue…

– Il y a exactement un an, aux Francos de Montréal, tu partageais la scène d’Hubert Lenoir, qui a connu aussi une ascension vertigineuse au Québec : quel regard portes-tu sur ton année passée ?
C’était une année exceptionnelle ! Ce qui est rigolo, c’est que lorsque je faisais effectivement la première partie d’Hubert Lenoir l’an dernier, j’imaginais bien que j’aurais la chance de revenir. Mais je ne pensais pas rechanter dans une salle aussi grande que le Mtélus, dans laquelle j’étais venue voir mon grand frère ici, Roméo Elvis, l’an dernier. Je n’imaginais pas non plus que je ferais une salle à Québec Ville, où j’ai chanté hier. Il s’est passé vraiment vraiment beaucoup de choses…
– Avais-tu des ambitions internationales quand tu as commencé à faire de la musique, ou même à la sortie de ton album ?
Pas vraiment, pour être honnête. D’ailleurs, pour être précis, quand on parle de carrière internationale, dans mon cas ça se limite quand même à la Francophonie, ce qui est déjà beaucoup. Je n’ai jamais vraiment eu envie d’aller plus loin, parce que j’accorde beaucoup d’importance aux textes, qui sont essentiels dans la musique que je fais. Je me verrais mal raconter mes histoires face à un public qui ne les comprendrait pas. Après, l’idée de donner des concerts à l’Etranger serait enrichissante en termes d’expérience et cela pourrait aussi nous apporter beaucoup de plaisir, à moi et mon équipe. Mais je n’ai jamais eu cette ambition, ni même celle de sortir de la Belgique en fait, puisque c’est là que j’ai commencé en donnant des concerts dans des bars. Je ne concevais même pas de jouer en France un jour ; c’était un truc de fou pour moi. Je n’imaginais vraiment pas ce qui nous arrive, tourner partout et être complet dans de grandes salles.

– En Belgique, on peut considérer qu’il y a deux communautés linguistiques chez les chanteurs. Il se trouve que presque tous les artistes flamands chantent en anglais, y compris des artistes francophones : la question du choix de la langue s’est-elle posée pour toi ?
En fait, je ne me suis jamais posé la question. Quand j’ai commencé à faire de la musique, je n’avais pas de stratégie particulière ou d’ambition en tête. Je faisais les choses très naturellement : de manière générale, je ne pense pas qu’on réfléchisse à ce genre d’alternative de la langue quand on s’engage dans un carrière artistique. J’ai fait les choses telles qu’elles venaient, telles que je les imaginais. Ca m’est un peu tombé dessus comme ça. Au final, la façon dont mon projet est reçu est liée au fait que je chante en français. Du coup, le public en France et en Suisse se sont intéressés à moi, et ensuite au Québec. Mais je n’avais pas d’envie de départ de m’exporter dans ces pays : je n’avais pas d’autre ambition que de faire de la musique et d’écrire des textes qui avaient du sens pour moi. C’était donc très important de les écrire dans ma langue maternelle, que je maitrise beaucoup mieux que l’anglais, même si j’ai écrit de premières chansons plus personnelles en anglais.
– En quoi étaient-elles plus personnelles ?
Elles restent personnelles, dans le sens où j’en ai un peu honte. Du coup, je n’ai pas forcément envie de les partager (rires). Les textes ne sont pas si intimes que cela, mais je les ai écrits quand j’avais seize ans. Ils ne me paraissent plus très intéressants ou pertinents. j’ai grandi depuis, donc je n’ai pas envie d’en faire quelque chose aujourd’hui.

– Un premier album est souvent le résumé de chansons écrites depuis des années, et retrace parfois l’histoire d’une vie : as-tu le sentiment de beaucoup te dévoiler sur le tien ?
Certainement, mais en fait, je ne pourrais pas faire autrement. Je ne m’inspire que de ce que je vis, par facilité et parce que ça me semble naturel de parler du présent, et de mon présent en particulier.
– C’est la recette de sa grande cohérence selon toi ?
Sa cohérence tient au fait que c’est un album écrit assez vite finalement. La dernière chanson de l’album « Tout oublier », a été écrite au mois de juin-juillet de l’an dernier, alors que l’album est sorti en octobre. Il se trouve que c’est devenu le morceau qui a le plus fonctionné. C’est assez rigolo comme les choses avancent : elles prennent toujours un autre chemin que celui qu’on avait imaginé.

– C’est pourtant « La loi de Murphy » qui a lancé l’album…
En effet, et d’ailleurs j’avais écrit cette chanson dans un contexte totalement différent de celui du reste de l’album, que j’ai écrit et composé seule. « La loi de Murphy », a été conçue avec deux autres artistes : Matthew Irons et Veence Hanao. Je les ai rencontrés par le biais de mon manager qui travaillait avec eux deux. A cette époque, je me posais plein de questions, j’écrivais plein de choses, mais plutôt en anglais, notamment cette fameuse chanson dont j’avais un peu honte, mais je n’avais pas forcément beaucoup d’attachement à ces chansons-là. Je postais également des videos sur Instagram. Comme ce que je postais sur les réseaux sociaux avait l’air de plaire, pour le côté décalé et second degré, je me suis dit : pourquoi ne pas faire une chanson un peu dans cet esprit ? Il se trouve que j’ai rencontré Veence après une journée pluvieuse, assez typique bruxelloise. Un monsieur qui faisait pipi dans la rue a aussi failli souiller mes chaussures… Enfin bref, je suis arrivée chez lui épuisée par cette journée tellement « difficile », qu’on en a beaucoup rigolé, et notamment de cette capacité que j’avais à me plaindre de petites choses pas très graves, et qui n’étaient au fond que la preuve que j’étais quelqu’un de plutôt privilégié dans la vie. En soi, c’était déjà une bonne nouvelle pour moi.
– Avez-vous écrit d’autres chansons ensemble ? Seule celle-ci figure sur l’album…
Non, on a écrit ce titre, mais ensuite on n’a pas réussi à écrire d’autres chansons. Je crois que j’étais lancée en fait. J’avais bien rigolé et appris plein de choses à son contact, en écrivant des morceaux en anglais, en français, en s’essayant au Rap, au chant, et à plein d’essais d’arrangements. Après cela, j’ai écrit toute seule « Je veux tes yeux », mais je suis restée assez proche de lui. Je lui envoyais mes textes pour avoir son avis, parce qu’il a une écriture hyper intéressante. Il m’a pas mal conseillée au début, et ensuite presque plus. Je lui ai notamment envoyé le texte de « Balance ton quoi », parce que je voulais aussi l’avis d’un homme, pour que la chanson soit assez inclusive. Il m’a fait quelques commentaires sur certaines phrases dont il trouvait qu’on ne les comprenait pas bien. « La loi de Murphy » a donc été le premier titre, et il est resté un peu à part, car ensuite tout l’album a été construit totalement différemment, dans un autre contexte.

– Tu évoques ton côté second degré et décalé, mais ça ne t’empêche pas de parler de sujets de société plus graves comme sur « Balance ton quoi » justement…
Ca dépend des chansons. Quand j’écris une chanson comme « La flemme », qui raconte la paresse d’un samedi soir, il n’y a pas de message tellement profond derrière, même si c’est une chanson très honnête et sincère. Après, quand je parle de sexisme, j’essaie de le faire de façon toute aussi honnête et sincère. Je ne fais pas de différence entre « La flemme » et « Balance ton quoi », dans le sens où au vu des autres, il y a peut-être un message politique qui va être perçu sur la seconde, mais je n’invente rien : ce n’est que du bon sens et un triste état des lieux. Alors je parle de sexisme parce que je suis une femme et qu’on sait tous que le sexisme est très ancré dans nos sociétés. Mais mon choix a été d’essayer d’aller plus loin et d’en savoir plus, que ce que je vivais à titre personnel. De comprendre ce que d’autres femmes dans d’autres contextes, d’autres situations, pouvaient vivre. C’est là que la chanson est peut-être devenue plus engagée. Mais à la base, tout est parti de quelque chose de très sincère et de très spontané.

– Le clip de cette chanson très explicite et plein d’humour a aussi beaucoup contribué à son impact…
L’humour permet toujours de prendre une vraie distance et d’installer un décalage salutaire quand on aborde certains sujets. Evoquer le sexisme dans une chanson peut être compliqué. C’est un sujet complexe à la base, mais la musique doit aussi rester pour moi un divertissement. Je sens que c’est ce que les gens attendent de moi et j’ai envie qu’ils continuent de s’amuser en venant me voir. Cela étant, je pense que s’amuser et réfléchir peuvent être combinés, et l’humour y contribue grandement.
– Cette chanson offre une mise en abime intéressante, lorsque tu partages tes interrogations d’artiste sur les mots que tu devrais employer dans la chanson, ton éventuel passage à la radio, etc.
C’est vrai. Il se trouve qu’effectivement, je ne passais pas en radio quand j’ai écrit cette chanson. Du coup, aujourd’hui les gens ne comprennent pas pourquoi j’ai écrit cela, parce que pour le coup, ils m’ont beaucoup entendue sur les ondes depuis avec « Tout oublier »…

– Pensais-tu sincèrement que cette chanson « Balance ton quoi » serait boycottée par les programmateurs ?
Mais oui, j’étais persuadée qu’une chanson qui parle de sexisme allait leur faire peur ! Et finalement, ils ont joué le jeu et j’en suis très heureuse, parce que c’est réconfortant de se dire qu’un message comme celui-ci peut être soutenu en radio et en télé. Après, j’espère qu’il est bien compris. Cela dit, cette interrogation sur mon passage en radio était un peu une blague aussi, parce qu’au fond de moi, j’avais quand même confiance en cette chanson. C’était pour moi une façon de rigoler avec l’auto-censure. Je n’ai pas forcément envie de choisir les mots qui ne vont pas choquer : je tiens à ce que tout cela reste spontané.
– C’est une chanson qui, dans sa construction et le ton employé, évoque « Fuck U » de Lily Allen… Avais tu des appréhensions sur la façon dont elle allait être reçue ou interprétée ?
C’est vrai que Lily Allen est une référence pour moi et j’y ai pensé bien sûr ! Je n’avais pas d’appréhensions particulières, mais j’ai été très surprise du peu de réactions autour de ce titre entre la sortie sur l’album, le 5 octobre dernier, et celle du clip mi-avril. Pendant ce laps de temps, on a assez peu parlé de cette chanson finalement. Ce n’était qu’une chanson au milieu d’autres chansons. Mon point de vue féministe, bien que très ancré en moi, n’a pas suscité beaucoup d’intérêt. Il a fallu que je sorte un clip pour que soudain, on m’en parle énormément. Je pensais que tout était dit dans la chanson. C’est bien la preuve que non. Le clip a apporté encore plus d’informations sur le sujet : il a permis d’en remettre une couche, en y travaillant avec d’autres personnes, et d’aller plus loin que ma chanson, qui était un point de vue assez personnel en fait. Si on voulait parler de sexisme, il fallait évoquer ce que toutes les femmes subissent. Le clip a rectifié le tir : on a beaucoup travaillé en ce sens, et c’était très important pour moi d’avoir le soutien de Charlotte Abramov qui l’a réalisé, avec son équipe. Notamment Ophélie que je mentionne souvent, parce qu’elle a été hyper impliquée dans l’écriture de ce clip. On s’est beaucoup renseignées les unes et les autres, et d’ailleurs, depuis le tournage, on continue de s’envoyer des livres, des articles sur le sujet. On s’est rendu compte qu’il nous restait beaucoup à apprendre et le fait d’en discuter nous a permis justement d’essayer d’être le plus inclusives et inter-sectionnelles que possible. Il y a encore du chemin, y compris pour moi. C’était hyper important de faire passer le message avec plein d’humour et de légèreté, sans faire peur aux gens avec ce sujet. A un moment, il faut arrêter d’avoir peur.

– Tu évoques souvent Charlotte Abramov : comment choisis-tu tes proches collaborateurs ?
Je ne sais pas si les choisis, ou si ils s’imposent naturellement finalement. Toutes les personnes avec lesquelles j’ai travaillé, pour des featurings, ou ma propre production comme avec Charlotte, sont des gens que je connais. J’aime travailler avec des gens en lesquels je peux avoir confiance et réciproquement. La collaboration avec Damso, par exemple, a été assez inattendue, et finalement très importante. Travailler avec un rappeur qui avait sa carrière et ses textes, et entrer dans ce milieu-là en tant que chanteuse qui faisait de la Pop, était importante. Pouvoir exister aussi dans ce cet univers, et être reconnue et respectée en tant que femme, était une victoire pour moi. On se connait très bien, et c’est un peu pareil avec tous les gens avec lesquels je bosse. Ce sont toujours des rencontres humaines à la base. Chaque jour, chacun de nous se perfectionne et on finit par être meilleurs ensemble…
– Comment la chanson « Balance ton quoi » est-elle perçue en live ?
« Balance ton quoi » est très jouissive pour le public quand je la joue sur scène. Je suis toujours très émue de voir que j’arrive à faire passer un message comme celui ci de façon aussi positive. C’est génial pour moi. Je le vois au visage des femmes, et pas seulement des jeunes filles, dans les premiers rangs, mais aussi pour les hommes qui participent. J’ai reçu plein de messages au sujet de cette chanson. Dernièrement, il y a eu une manifestation féministe en Suisse pendant laquelle la chanson a tourné en boucle. Ca me fait toujours bizarre et en même temps, chaud au coeur, parce que je persiste à penser que faire passer un message aussi lourd, aussi complexe, sur ce ton-là et sur des notes aussi légères, est très agréable. Le contraste est intéressant et me plait.

– Comment as-tu vécu l’évolution de tes prestations Live ?
Mon concert a beaucoup évolué depuis un an : j’ai expérimenté quatre ou cinq formules différentes de concerts depuis octobre 2017 et « La loi de Murphy ». J’ai d’abord fait des premières parties, de Damso notamment. C’était vraiment une découverte parce que je n’avais jamais fait de concerts en salles. C’était une expérience hyper dure, mais hyper enrichissante pour moi. J’ai vraiment pu m’entrainer et découvrir ce qu’était d’avoir un public qui ne vient pas pour soi. Ensuite, sont arrivés les premiers concerts à mon nom, dans de petits clubs. Puis j’ai joué dans les festivals, et ensuite j’ai changé d’équipe après la sortie de l’album. Là, j’ai donné des concerts face à un public qui connaissait l’album et toutes les chansons. C’était une découverte pour moi. Et enfin, depuis un mois en France, on fait des Zéniths, qui sont de très grosses salles, et c’est encore une nouvelle histoire que je raconte. Ce que j’aime beaucoup avec le Live, contrairement à un album, c’est que ce n’est jamais figé. Le côté frustrant d’un album, c’est qu’une fois écrit, composé, produit, mastérisé et sorti, c’est cadenassé et on ne peut plus y toucher. Or moi, j’adorerais pouvoir y retoucher, parce qu’il y a déjà plein de choses qui pourraient être modifiées, améliorées… Du coup, je compense en écrivant de nouvelles chansons, ce qui est bien aussi. Sur scène, c’est différent, on peut toujours changer des choses. En ce moment, on est en formation assez intense : nous sommes trois musiciens sur scène, je suis aux claviers, accompagnée d’un batteur et d’un clavieriste qui joue des basses et des claviers. Et puis, on est désormais entourés de quatre danseuses. Ca apporte une vraie énergie. Hier à Québec, on jouait dans une salle petite par rapport à celles dans lesquelles on se produit actuellement. C’était très cool. Il y avait une énergie de dingue : les gens étaient tellement proches ! On s’est habitués ces derniers temps à voir les gens éloignés de quelques mètres, séparés par l’espace de sécurité, etc. C’est parfois un peu impersonnel. De se retrouver dans une ambiance de club nous a vraiment donné beaucoup d’énergie… Le show a beau être toujours le même, on ne sait jamais comment ça va se passer ou comment les gens vont réagir, sur telle ou telle chanson. C’est toujours une surprise. Et ça, c’est vraiment cool !
– Fais-tu une distinction entre les spectacles en salles et ceux en plein air sur des festivals ?
C’est très différent, et j’aime vraiment les deux. J’ai commencé à faire quelques Zéniths, qui sont de très grandes salles, qu’il a fallu vraiment apprendre à gérer et à remplir, avec mes musiciens et mes danseuses. Sur des festivals, les gens ne sont pas vraiment là que pour moi. L’attente est moins intense, et en même temps, il y a beaucoup plus d’électricité dans l’air car ils vont voir des concerts avant et après : ils sont dans une énergie où ils ont envie de s’amuser, et il y a souvent une ambiance de vacances. Tout le monde est là pour faire la fête et j’ai envie de partager cela avec eux…
– Quel est ton secret pour garder le rythme et garder la forme ?
Tout le monde me demande si je tiens le coup, comme si j’avais un travail très difficile. Mais en fait, c’est tellement agréable, que la question ne se pose pas : je n’oublie jamais que je fais un métier que j’aime, que j’ai choisi, et que je suis chanceuse de pouvoir exercer. En plus, ça fonctionne bien pour moi, donc je n’ai pas à me plaindre. C’est vrai que ça peut devenir difficile quand la fatigue physique impacte la fatigue mentale, et je reconnais qu’être constamment sollicitée, entourée de micros me met une certaine pression. Je me sens obligée de dire des trucs intelligents, ce qui n’est pas toujours le cas. Etre souvent sur scène demande à être tout le temps en forme, ce qui n’est pas le cas non plus. Le simple fait de marcher dans la rue exige que je sois toujours souriante avec les gens, ce qui n’est pas toujours le cas. Bref, toutes ces choses peuvent être parfois « déshumanisantes », dans le sens où on attend d’un artiste qu’il soit constamment apte à faire son métier. Or, mon métier je l’exerce quand je chante, et le reste du temps, je suis un être humain comme les autres. Ca a été assez difficile pour moi à gérer au début : j’ai du dealer avec cette notoriété intense qui est arrivée très vite, en me disant que c’est aussi grâce à cela que je remplis des salles. Donc, j’essaie de ne pas m’en plaindre, de garder à l’esprit que ce ne sont que des choses positives, que je reçois beaucoup d’amour et de soutien. Du coup, j’essaie toujours de remercier au mieux les gens et d’être à la hauteur pendant les concerts.
– Quel est ton rapport aux réseaux sociaux, très importants dans ta carrière et ta popularité ? Gères-tu toi-même ton Instagram ?
C’est moi qui poste les photos. La question s’est posée de prendre un Community manager, parce que ça me demande beaucoup de temps. Alors j’essaie de faire ça de façon intelligente. La seule chose qui puisse arriver, c’est que je ne sois pas disponible pour publier des posts informatifs sur mon activité, comme des dates de concerts qui ont besoin d’être postés à telle date et telle heure, pour des questions de visibilité. Dans ces cas exceptionnels, je vais quand même écrire le texte à l’avance, choisir la photo, jusqu’au graphisme etc. Mais dans la plupart des cas, c’est moi qui fait les stories et les posts. C’est un média, mais aussi un moyen qui me permet de rester proche des gens. Evidemment, je ne peux pas échanger avec tout le monde, parce que sinon, j’y passerais ma vie. Mais il m’arrive de discuter avec les fans et j’espère pouvoir continuer à le faire encore longtemps… En puis en tant que média, ça me permet de garder le contrôle sur mon image : encore récemment, je suis tombée sur une photo sur laquelle on m’avait agrandi les yeux et rajouté un sourire : c’est très grave quand même… Je reste quand même libre de tirer la gueule ou pas, et tant pis si ça ne plait pas aux gens. Sur Instagram au moins, je me sens totalement libre…

– Tu fais souvent la fofolle sur tes photos, et gardes une simplicité étonnante…
C’est l’intérêt d’Instagram d’être un outil très spontané et très direct. Il n’y a aucun intermédiaire, alors que dans les medias, il y aura toujours quelqu’un qui va réécrire, couper ou modifier mes propos, ne fut-ce qu’un mot… Or un seul mot peut parfois changer le sens d’une phrase. Après, je m’impose un petit filtre personnel, sans quoi je pense que je ferais encore plus de blagues. Mais j’aurais peur d’offenser des gens et de ne pas être comprise. Du coup, je me suis un peu assagie dans mes blagues et dans ma spontanéité ces derniers temps. Je suis suivie par presque deux millions de personnes : je ne voudrais blesser personne. Mon seul but est de faire des blagues et de faire rire les gens…
– Etant issue d’une famille d’artistes connus en Belgique (son papa est le chanteur Marka, et sa maman la comédienne Laurence Bibot), t’arrive-t-il encore de douter de ta légitimité artistique ?
Disons que j’avance sur la quête de la légitimité. Je pense l’avoir trouvée, à force de travail. Mais c’est vrai qu’à un moment, à toujours devoir parler de mes parents et de ma famille, j’ai fini par me persuader que tout ce qui m’arrivait leur était du. Aujourd’hui, je réalise qu’au-delà de leur célébrité, ce qui m’a aidé surtout, c’est d’avoir des parents qui m’ont soutenu psychologiquement. Ma grande chance a été d’avoir une famille ouverte, qui n’a eu aucune difficulté à comprendre que je voulais faire de la musique, avant même d’ailleurs que je veuille me lancer en tant que chanteuse, lorsque je faisais simplement des études de Jazz en piano. Petit à petit, les choses sont arrivées tellement vite, que je n’ai pas eu le temps d’analyser ce qui m’est tombé dessus. Je commence à peine à prendre du recul, et je me dis que j’ai une chance incroyable parce que les dates se remplissent, je vends des albums et je passe à la radio… Donc, « La loi de Murphy » a plutôt été gentille avec moi… Sans doute parce que j’ai écrit une chanson sur elle ! (rires) En tout cas, quoiqu’on en pense, je me sens très épanouie et très indépendante dans ce que je fais : écrire des chansons est pour moi un réel exutoire, parce que j’ai souvent du mal à exprimer les choses avec des paroles dans la vraie vie. Simplement, je ressens un vrai soutien de ma famille, et je les soutiens aussi. Il existe une vraie compréhension entre nous. Après, on reste une famille comme les autres… Or, dans une famille, il n’y a pas que le boulot, même si on fait tous le même au cas particulier. A part ça, on reste une famille normale…

– Un mot sur l’association KickCancer au service de laquelle tu mets ta notoriété ?
C’est une association belge qui a vocation à trouver des fonds pour les enfants atteints de cancers, car la recherche manque énormément d’argent, s’agissant de cancers assez rares pour certains. Quand ils m’ont contactée, ça m’a paru hyper important de pouvoir les aider et je suis devenue ambassadrice de cette association. Une course aura lieu en septembre, à laquelle je participerai, pour essayer de récolter de l’argent. Je trouverai toujours du temps pour eux, c’est la moindre des choses que je puisse faire… La notoriété est une chose assez difficile à comprendre en soi, et assez inhumaine : si la mienne peut au moins servir à cela, c’est une satisfaction pour moi. Sinon, je ne vois pas très bien à quoi elle sert…
Propos recueillis (à Montréal et à La Rochelle) par Eric Chemouny
photos: en studio : Charlotte Abramov (DR) / Les Francos de Montréal (DR / Spectra) / à La Rochelle : Eric Chemouny (DR/JSM)
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