BERTRAND BELIN
La beauté du geste
Bertrand Belin, au-delà d’une carrière remarquable, a passé une nouvelle étape, celle de la reconnaissance populaire, avec “Persona”, son dernier album sorti le 25 janvier. Signe avant-coureur, l’Olympia, son premier, a affiché complet très rapidement et bien avant la sortie de l’album, il y a un an déjà. Nous étions présents à ce rendez-vous étrange et beau…

Un Olympia dans la pénombre laisse filer quelques fins rayons de lumière d’un mur de plaques de métal en effet miroirs, laissant présager la grand messe d’un dandy orateur, totalement charismatique et à la voix singulière, poétique, caverneuse qui accentue davantage cette magnétique attirance. Bertrand Belin n’a pas besoin de beaucoup d’esbrouffe pour rameuter la foule : un geste, un regard, une pose, une immobilité qui force le respect et cette autorité naturelle qui fait de lui un mélange de discrétion et de panache, qui d’un geste de la main hypnotise d’emblée son assemblée au grand complet, venue découvrir sur scène l’incarnation de l’album “Persona”, album dense et incarné, habité, transporté sur les routes mystérieuses de cette voix qui l’est toute autant.

De cet album, Bertrand Belin va faire la colonne vertébrale de son tour de chant, musicalement fidèle à son enregistrement parfait. Un tour de chant assez minimaliste mais terriblement éloquent, élégant, qui s’ouvre sur le titre “Bec”, comme sur l’album auquel il consacre les huit premières chansons de ce concert (l’album en compte 13) : “Bec”, “Bronze”, “Glissé Redressé”, “Sur le cul”, “Choses Nouvelles”, “L’Opéra”, “En rang (Euclide)” avec Tatiana Mladenovitch, singulier et beau, et enfin “Grand Duc”.

“Peggy”, réarrangée, sera sa première incartade (extrait de l’album “Parcs”, 2013) tout juste suivie comme une évidence par “Y’en a-t-il ?” (de l’album “Hypernuit”, 2011) puis de la très attendue et très applaudie “Hypernuit” dans une superbe et élégante version acoustique qui laisse éclater sa nonchalante mélodie sous les applaudissements d’un public exalté.
Puis méthodiquement, mais avec une douce fluidité, Bertrand Belin offre un titre de son précédent album “Cap Walker” (2015) : “Folle Folle Folle” et un peu plus tard, lors d’un premier rappel, un autre extrait du même opus, “Le Beau Geste”, très attendu lui aussi, avant d’exploser avec “Dimanche” le titre des Liminanas, dont il a écrit le texte et sur lequel il a posé sa voix, fort et splendide.
La soirée s’achève sur “La chaleur”, extrait d’ “Hypernuit”, bouclant une setlist à l’élégance absolue, un sans fautes ponctué d’interventions à la fois très drôles, parfois décalées et surprenantes, qui dépeignent des petites gens comme de grands politiciens. De sa déclinaison puissante de tons autour du travail, de la rue, de la vie, à sa grandiloquente satire politique, Bertrand Belin nous transporte loin de notre monde capital, presque dans un univers parallèle, aux réalités aussi dures, mais dont il est le créateur et l’acteur d’une seule voix, unique et envoûtante, au phrasé enchanteur.


Entre ses ballades du grand Ouest et un Rock plus hexagonal, le beau dandy se fait poseur et charmeur, transportant son tour de chant qui semblait si calme en un voyage fantastique, furieusement Rock, délicieusement suranné, absolument unique, dans des chemins de traverse aux infimes distorsions. Dans notre critique de l’album “Persona”, nous évoquions notre sentiment d’atmosphère très lynchienne. Ce concert, à la fois hyper réaliste et très onirique, confirme cette étrangeté hors du temps, épisode cinématographique distendu, à l’orée des deux mondes dont on ne ressort pas totalement indemne.
Gregory Guyot.
credit photos: Gregory Guyot (D.R. / IG : @I_am_Gregg / JSM)
Setlist Olympia 11.04.19. : Bec / Bronze / Glissé Redressé / Sur le cul / Choses Nouvelles / L’Opéra / En rang (Euclide) / Grand Duc / Peggy / Y’en a t-il? / Hypernuit / Folle Folle Folle / Camarade / Vivant // Rappel 1 : Sous les lilas / Le mot juste / Dimanche // Rappel 2 : La Chaleur.
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