DISCORAMA #13

Promenons-nous dans les bacs…

édition JSM#13 . 13.10.18.


DISCORAMA, c’est notre panorama des sorties de cet automne : Que penser du nouvel opus de Mylène Farmer, du virage funk de Chris(tine) , du premier album d’Angèle, de celui du libre Murat, du profond Miossec, du virage folk de Nolwenn, du faiseur de tubes Pascal Obispo, de la nouvelle venue Pop Emma Solal, de la nouvelle réédition du « Petite Amie » de Juliette Armanet, du 1er single de Julia, des nouveaux collectors vinyle d’Etienne Daho et de l’album posthume de Maurane, sur les mots de Jacques Brel ? nos réponses sont ici… Bonne écoute et belles découvertes… C’est parti !

JSM 13 Je Suis Musique Album (12)

CHRISTINE & THE QUEENS

« Chris »

(Because / Warner Music )

Autour du retour de Christine and the Queens en mode « Chris », il y a eu beaucoup l’incompréhension, de l’agacement, du rejet voir du refus du changement pour qui s’arrêtait sur une apparence (des cheveux coupés, une androgénie plus marquée… grattant la question du genre) comme sur une envie de la retrouver en sage prolongement de la jeune fille de « Chaleur humaine » et de la voir réitérer un succès devenu mondial (avec plus d’1.3 Millions d’albums vendus dans le monde, dont 800 000 en France). Passées ces phases bousculées et brutales et l’acceptation de cette nouvelle image (qui n’est que visuelle tant celle qui l’habite est restée elle-même), nous partons à la découverte de ce second opus porté en amont par un single ouvrant sur de nouveaux horizons, « Damn, Dis moi  / Girlfriend», qui reflète exactement cette nouvelle orientation. Avec « Chris », le génie et le talent de Héloise Letissier éclate encore plus que sur « Chaleur humaine », musicalement encore plus pointu, dévoilant au grand jour l’ambition de conquérir le monde (l’album est proposé en français et en anglais simultanément) avec de puissantes armes à la clef, la musique en tête, sur des mots et des thèmes toujours aussi forts qui sont le porte-drapeaux de son émancipation en même temps que celui d’un monde en transformation. Chris relève ainsi le défi d’un album exigeant et déterminé qui a tout pour faire plier le genou et mettre à ses pieds les plus grands protagonistes de la planète G-funk et réussir en même temps à nous faire danser made in France sans rougir de ses inspirations outre-atlantique. Un album rare que n’aurait pas renié par exemple un Quincy Jones averti tant il sonne comme ses plus grandes productions de la fin des années 70-début 80, son idole Michael Jackson en tête, pour ne citer que lui parmi beaucoup d’autres références somptueuses.  « Chris » exulte ici l’héritage d’un « Thriller »  , d’un « Off The Wall » , un peu d’un « Bad » aussi (pour ne citer qu’eux) qui va bien au delà de sa première tentative de reprise(« Who is it », 1991) . Elle signe ici  peut être le premier album « afro funk américain » d’une petite « white » française. Bien sûr on retrouve quelques samples et inspirations de son idole : l’album s’ouvre d’ailleurs sur celui de « Another part of me », le clip de « Damn » rappelle la projection de « The way you make me feel » version « This is it », sur scène, les chorégraphies jusqu’à son look rappellent les codes du king of pop et les instruments de cet album semblent lui avoir été empruntés pour donner un son absolument parfait. Comme l’avait fait Justin Tilmberlake en son temps, Chris entraîne cette influence avouée dans une modernité totalement jouissive et décomplexée. Là, concentré dans cette écoute dont le premier abord n’est pas évident avouons-le, on se dit qu’Héloise a eu raison d’imposer Chris, de lui avoir taillé un album aussi élégant et classieux, à la production aussi léchée et dont la voix limpide et souvent impressionnante (comme sur « L’étranger » qui clôt l’album) l’emporte encore plus haut. Paradoxalement, en fabriquant une nouvelle image, Héloïse touche à son essentiel : son expression la plus sincère et authentique qu’elle transfigure sur scène : ses premières prestations pour soutenir « Chris » ont soufflé son audience dans une mise en scène absolument remarquable et intelligente, millimétrée qui a imprégné d’images fortes chaque chanson qui transcende nos sens au delà de nos oreilles attentives. On est alors impatients de la voir investir pour la première fois l’AccorHotels Arena en décembre prochain.

Gregory Guyot


JSM 13 Je Suis Musique Album (1)

MYLENE FARMER

« Désobéissance »

(Label 6 et 7)

Mylène Farmer est un concept.  Un mystérieux et inexplicable cas absolument unique, star parmi les stars, intouchable, inclassable, insaisissable et incomparable, tant et si bien qu’on n’écoute plus « l’album de chansons d’une chanteuse » mais on écoute « du Mylène Farmer », quelle qu’en soit sa qualité et son contenu. Celle qui chantait la veuve noire nous entraîne de nouveau dans sa toile assez vicieuse, nourrie par l’engouement , la ferveur et la dévotion des fans qui n’ont jamais fléchi en plus de 30 ans de carrière. Avec ce 11ème album studio, « Désobeissance », on est ici au cœur de l’essence même d’une artiste qui a déjà convaincu avant même d’avoir montré, dans le meilleur comme dans le pire. C’est l’album d’une magicienne qui se déverse au ralenti de lancinantes plages électroniques habillant des textes contournables, sans les aspérités qui ont contribué par le passé à construire la légende Farmer et qui arrive pourtant à nous séduire, à la force du temps. Certes, cet album remplit le cahier des charges de la cargaison des singles évidents mais au détriment de trop nombreux autres « titres-remplissage » : en tête, cette « Histoire de fesses », qui concentre tout ce qui fait défaut à cet album : absence de mélodie , de texte, d’idée, dans une version de travail pas finie (sic!) ou encore « Au lecteur » un ghost track en plein milieu de la tracklist (re-sic!). A l’inverse, avec « Rolling Stones », « N’oublie pas » avec LP et le bonbon Pop « Sentimentale », on pourra parier sans tromper sur le titre « Désobéissance », plutôt très efficace (et osons l’avancer: le meilleur titre de l’album),  le facile « On a besoin d’y croire » (variation down-tempo de « XXL ») qui plaira forcément ou « Retenir l’eau », le titre lacrymal « Mylénesque » qui clôt l’album, on tient nos singles potentiels.  Le reste des morceaux finit par séduire à la force du temps (« Get up Girl », « Prière » « Des larmes ») et trouveront certainement leur raison d’être en version live sur la scène de l’U-Arena en juin prochain, distillant l’impression en demi-teintes d’un album au final ni vraiment raté, ni facilement réussi. Un album sans nuance qui n’est pas désagréable à écouter non plus car plutôt bien produit et sur lequel on fermera les yeux sur son manque de jolies mélodies, d’implication, d’inspiration et d’engagement. Ce répandu défaut de qualité qu’on n’aurait pardonné à personne d’autre s’efface « parce que c’est Mylène ». Là est tout le problème et son paradoxe tant elle exerce, une fois encore, un redoutable pouvoir d’attraction faisant de cette « Désobéissance », la bombe à retardement la plus dangereuse de cette fin d’année.

Gregory Guyot


JSM 13 Je Suis Musique Album (4)

PASCAL OBISPO

« Eponyme »

(Mercury / Universal)

Pour son premier album au sein de Mercury / Universal, le 11ème après plus de 25 ans de carrière solo chez Sony-Music, Pascal Obispo a vu les choses en grand : annoncé par un single Pop et fédérateur ce printemps (« Chante la rue chante », au texte signé Pierre-Yves Lebert), suivi du très énergique « Rien ne dure », ce nouvel opus a des allures d’événement discographique à plus d’un titre. D’abord, parce qu’il constitue musicalement, dans son interprétation comme dans sa production, un véritable retour aux sources, pour celui qui fut un des premiers à remettre au goût du jour la variété Pop au début des années 90, en proposant des chansons très mélodiques, rehaussées de jolis arrangements de cordes, et souvent chantées sans complexe d’une voix de tête. Ensuite, parce qu’il a su fédérer autour de lui toute une famille d’artistes, plus prestigieux les uns que les autres : Benjamin Biolay en qualité de producteur, duettiste ou parolier occasionnel, choisi pour son côté « dark » selon l’intéressé lui-même (« Allons en fan », « Amy », « Toxicomanes »), l’excellente Edith Fambuena (« On n’a rien fait de mieux »), Calogero (en duo sur « A Forthlin Road »), Philippe Pascal (en clin d’oeil à Marquis de Sade et ses années rennaises, sur « Je rentre »), et le vénéré Christophe (en duo sur le splendide et cosmique « Poète maudit »). Sans oublier la star Isabelle Adjani, pour laquelle il a écrit tout un album jamais sorti, dont est probalement extrait ce « D’accord », superbe titre sur lequel résonne également la voix envoûtante Youssou N’Dour. Autant de collaborations qui ont du sens pour l’artiste, et vont au-delà de la constitution d’un joli casting comme c’est de coutume ces derniers temps. Enfin et surtout, Pascal Obispo s’est attelé à écrire lui-même une bonne dizaine de titres sur les quatorze, paroles et musiques, ne confiant par exemple qu’un seul texte à son auteur fétiche historique, Lionel Florence. Et reconnaissons qu’il s’en tire plutôt avec les honneurs, proposant des textes qui le dévoilent plus que jamais dans sa complexité d’artiste et son intimité d’homme, avec sans doute quelques maladresses de débutant, mais une grande fraîcheur et une sincérité évidente. Ici et là, il a  laissé filtrer quelques name-droppings qui finissent par dresser un portrait en creux de lui et trahissent le fan qu’il n’a jamais cessé d’être (cf. « Et bleu », bel hommage aux femmes de notre pays, « Les chansons de Voulzy et Souchon », une idée de chanson originale, autant qu’un clin d’oeil confraternel au mythique tandem). Au final, l’ensemble en grande partie co-réalisé avec Pierre Jaconelli, mixé par Dominique Blanc-Francard et masterisé au mythique studio d’Abbey Road, constitue sans aucun doute un des meilleurs crus du bordelais de ces dernières années . Peut-être même le point de départ d’un nouveau cycle dans sa carrière déjà très riche en succès…

Eric Chemouny


JSM 13 Je Suis Musique Album (10)

MAURANE

« chante Brel »

(Polydor / Universal)

Il y a 40 ans, un 9 octobre, disparaissait l’immense Jacques Brel. Au printemps dernier et dans la perspective de cette commémoration, sa compatriote du plat pays Maurane, qui lui a toujours voué une admiration sans bornes au point d’avoir commencé sa carrière à 19 ans dans un spectacle collectif lui étant consacré (« Brel en mille temps »), et souvent repris ensuite ses chansons sur scène, décidait de lui consacrer tout un album : se glisser dans l’univers masculin d’un grand chanteur était un exercice plutôt familier pour l’interprète hors-pair puisqu’elle s’y était prêtée précédemment avec un franc succès, en reprenant Claude Nougaro, son autre grand maître… à swinguer celui-là. Malheureusement, alors que ce projet qui lui tenait tant à coeur, semblait lui avoir insufflé une nouvelle énergie et une envie de repartir de plus belle après de sérieux problèmes de santé, la chanteuse à la voix d’or s’en est allée brutalement le 7 mai dernier, plongeant son public et l’ensemble de la profession dans une infinie tristesse. Pour autant, sa fille Lou Villafranca a courageusement décidé de mener à terme, la réalisation de cet album de 12 titres avec Philippe Decock, le pianiste attitré de Maurane, et la complicité de ses musiciens fétiches. C’est également elle, artiste peintre, qui en a signé le visuel très réussi et l’émouvant texte de remerciements à la fin du livret. Au générique, et succédant à de nombreux artistes ayant célébré son impeccable répertoire composé uniquement de chefs d’oeuvre (Juliette Gréco, Florent Pagny…), Maurane a eu l’intelligence de sélectionner les incontournables tubes du grand Jacques, mais aussi quelques titres moins connus du grand public : « Vesoul » (premier extrait, plein de vie et d’énergie avec son traitement Jazzy), « Je ne sais pas », « La chanson des vieux amants », « La quête », « « Rosa », « Quand on n’a que l’amour », « Voir un ami pleurer », « Fils de… », « La ville s’endormait », ou encore « Ne me quitte pas », qui clôture ce magnifique album. Au-delà de l’émotion à ré-entendre celle qui fut la plus belle voix francophone de ces dernières années et un rêve d’interprète pour tous les auteurs-compositeurs, force est de constater la qualité de l’ouvrage d’un bout à l’autre : tout n’est ici que délicatesse, virtuosité et sens de la nuance. Tout juste entend-on quelques signes de fatigue vocale ici et là, mais cela n’apporte finalement que plus d’émotion, de proximité, de vécu, et d’humanité aux chansons de Brel qui certes n’en manquaient pas : si bien que quand s’achève ce rêve éveillé, on se prend à imaginer le coeur serré la magnifique façon dont Maurane aurait porté cet album sur scène, là où elle se sentait tout simplement chez elle !

Eric Chemouny


JSM 13 Je Suis Musique Album (2)

MIOSSEC

« Les rescapés »

(Columbia / Sony Music)

« Les rescapés est mon album le plus personnel musicalement depuis Boire ». Ainsi le breton Christophe Miossec qualifie-t-il son nouvel album, le onzième déjà depuis ses débuts remarqués, après le très réussi « Mammifères ». Habillé d’une pochette aux allures de sérigraphie signée Kate Gibbs, cet opus 11 titres qui s’est construit en trois étapes bien distinctes, de Brest à Paris, pendant un long périple d’une année s’étalant de mai 2017 à avril 2018, se veut plus organique que jamais : et à l’écoute des 11 titres qui le composent, il faut bien reconnaître que l’objectif est atteint, tant on entend derrière chaque note l’oeuvre de l’artisan, à la recherche du mot juste, et de l’économie d’effets, pour se concentrer sur l’essence même de chansons minutieusement conçues, avec un choix de couleurs sonores restreint et volontairement limité, comme pour mieux retrouver les contraintes et les limites des débuts, mais aussi rendre compte de   l’intensité et de la soif de vie qui l’a inspiré.  Déjà illustré par deux jolis clips (« Nous sommes » et « La mer, quand elle mord »), « Les rescapés » se veut aussi l’album des sentiments contrastés, entre joie et tristesse, à l’image de la vie cabossée de l’artiste, et plus précisément de quatre années de tournées et de fortes émotions scéniques, auxquelles il consacre ici pas moins de trois chansons : « l’aventure », « On meurt » et « Pour ». L’ensemble a été comme toujours écrit et composé par Christophe lui-même, à l’exception de « Pour » composé par Benjamin Lebeau, « La vie sentimentale » avec Mirabelle Gilis et « Les Infidèles » avec Leander Lyons. A noter aussi que dans cette volonté d’être au plus près d’une vérité intrinsèque, les chansons ont été enregistrées en live d’une voix rocailleuse indentifiable entre mille, avant d’être mixées par Dominique Ledudal, parfait acolyte de longues nuits studieuses, à refaçonner les chansons avec des guitares, toutes jouées par le chanteur virtuose. De « Nous sommes », à « La ville blanche », en passant par de jolies réussites comme l’autobiographique et désabusé « Je suis devenu », ou « Son homme », Miossec nous dévoile avec pudeur quelques uns de ses accidents de parcours, de ses blessures profondes dont le rescapé qu’il est, semble sorti humainement grandi et artistiquement inspiré, pour notre plus grand plaisir.

Eric Chemouny


JSM 13 Je Suis Musique Album (9)

JEAN-LOUIS MURAT

« Il Francese »

(PIAS)

Après le déstabilisant «Travaux sur la N89», paru l’an dernier, l’imprévisible et très prolifique Jean-Louis Murat nous livre déjà un nouvel album, le 22ème de sa carrière. Et contre toute attente, celui auquel on pouvait reprocher ces derniers temps une trop grande productivité, dont résultaient forcément des albums inégaux, voire trop expérimentaux donnant à regretter ses grandes années et ses albums cultes (de « Cheyenne Autumn », à « Dolorès », « Mustango » ou « Babel »), nous livre l’album que l’on n’attendait plus. Ce disque inespéré sur lequel il semble avoir retrouvé toute sa grâce et le meilleur de son inspiration, servies par une interprétation toujours aussi langoureuse, adolescente et sexy, doublée d’une production moderne et soignée. L’Auvergnat bougon dont on se ne retient trop souvent que les déclarations tapageuses, au lieu de se concentrer sur son oeuvre aux multiples influences, prouve ici l’intransigeance de sa démarche, en proposant un album plus organique que d’ordinaire, en forme de portrait puzzle, où se mélangent et se télescopent les fantômes de Marguerite de Valois, la sublime Silvana Mangano, le Murat de Napoleon et quelques cowboys et indiens égarés dans son univers. Plus facétieux que jamais, Murat se joue de l’auditeur en mélangeant réalité et imaginaire, allant jusqu’à s’inventer une géographie très personnelle où l’Amérique des grands espaces côtoie Naples et la plus voisine Italie, alternant des plages sophistiquées (à grand renfort de bruitages, sonorités étranges et de voix transformées) et d’autres plus classiquement limpides, comme pour mieux mélanger les cartes, et nous entrainer dans sa folle liberté créatrice, loin de tout formatage ambiant. L’opération séduction est plus que réussie, et pourrait bien permettre à la jeune génération de découvrir un de nos plus singuliers et talentueux artisans de la chanson française : le duo « Hold up » avec Morgane Imbeaud (ex moitié de Cocoon), ou les plus classiques et aériens « Je me souviens » et « Rendre l’âme » qui clôturent majestueusement cet album, sont à ce titre les sésames rêvés pour pénétrer l’univers foisonnant et immensément poétique de monsieur Murat.

Eric Chemouny


JSM 13 Je Suis Musique Album (11)

ANGELE

« Brol »

(VL Records / Entreprise / Universal)

C’est le phénomène du moment ! Avant même la sortie de ce premier album très attendu, difficile d’être passé à côté du phénomène Angèle depuis quelques mois. Agée d’à peine 22 ans, la bruxelloise était partout cet été : sur les réseaux sociaux où elle a vite été adoptée par des milliers de jeunes accros à ses rigolos posts de « It Girl » idéale sur Instagram (où elle totalise plus de 500 k followers, soit deux fois plus que la star Christine and the Queens), au cinéma où son clip très coloré « La thune » était multi-diffusé, dans un spot publicitaire pour le Thalys vantant les mérites de sa ville natale, sur les ondes avec trois premiers extraits envoyés aux radios en avant-goût (« La thune », « La loi de Murphy », « Je veux tes yeux »), dans les magazines (elle a déjà obtenu la couv’ très convoitée des Inrockuptibles, avec son frère le rappeur Roméo Elvis), ou encore dans les nombreux festivals d’été, de Fnac Live, à Biarritz en été, en passant par les Francofolies de Montréal. Et partout où elle est passée, la blonde jeune femme a fait l’effet d’une bombe, magnétisant un public de fans, de plus en plus nombreux, de ses chansons inclassables, aux textes pleins d’humour et de références aux préoccupations quotidiennes de sa génération (« Balance ton quoi », Victime des réseaux »), flirtant avec des influences musicales allant du Rap au Reggae, en passant par la Pop ou la variété. Habillé d’une photo inattendue d’elle enfant, qui donne le ton de l’ensemble et conforme à l’esprit de cette farceuse au visage d’ange et à la voix faussement candide, ce premier opus porte un titre non moins étrange : « Brol », qui signifie désordre ou gadget en argot belge. C’est dire son sens de l’humour et de l’autodérision, sans doute hérité de son illustre père, le chansonnier belge Marka, ayant connu son heure de gloire en France dans les 90’s. Pour autant, c’est avec beaucoup de sérieux et de professionnalisme qu’Angèle aborde ce métier qui lui sourit, puisqu’elle a créé son propre label, « Angèle VL Records ». Et comme elle a eu raison de croire en elle, tant ce premier coup d’essai est une réussite, par la diversité des chansons, leur qualité d’écriture, l’originalité et la fraicheur qui émanent de ce joyeux petit bordel « made in Belgium ». A ce titre, et alors qu’elle vient de lancer coup sur coup les extraits « Jalousie » et « Tout oublier », comme toujours servis par des clips originaux qui feront date, il n’est pas interdit de voir en elle une digne descendante de l’impertinente Lio des 80’s.

Eric Chemouny


JSM 13 Je Suis Musique Album (6)

JULIETTE ARMANET

« Petite amie Live »

(Barclay – Universal)

Jamais deux sans trois ! Après avoir proposé deux versions de son premier album couvert de louanges critiques et de succès public, puisque déjà récompensé par un disque de platine, la révélation féminine de l’année propose une troisième déclinaison  de ce « Petite amie », réédité sous forme d’un double CD, à l’occasion des fêtes de fin d’année, et orné d’un visuel encore différent, bleu nuit cette fois : on y retrouve tout d’abord les 16 titres de l’album quasiment tous devenus des succès scéniques, à en voir son public en concert, connaissant sur le bout des doigts toutes les paroles de «L’amour en solitaire », « L’indien », « Cavalier seule »,  « Alexandre », « Manque d’amour », « Un samedi soir dans l’histoire », « Star triste » ou « La carte postale ». Autant de titres ayant réconcilié le public avec la variété de qualité, quelque peu boudée ces derniers temps. Sans oublier l’audacieuse « Je te sens venir », cover hot de « I Feel It Coming » du chanteur The Weeknd, que la Belle inconsciente a même osé chanté devant Barack Obama. En supplément, on retrouve un deuxième CD comprenant 13 titres Live, et deux Bonus Tracks (« Les microsillons » en duo avec Alain Chamfort et « Cool Cat », une adaptation inédite de Queen). Certains jugeront sans doute que sortir déjà un album Live, en dépit du succès de sa longue tournée de 80 dates, est un peu prématuré pour une si jeune carrière. D’autant que celle qu’on surnomme, à tort ou à raison, « la nouvelle Véronique Sanson », a été très présente médiatiquement et de tous les projets collectifs ces derniers temps… Mais va-t-on bouder son plaisir pour si peu ? La réponse est non, évidemment. D’autant que la perspective prochaine d’un heureux évènement dans sa vie devrait obliger cette autre Juliette de la chanson à marquer une pause bonheur, qu’on espère inspirante pour son deuxième album très attendu et qui sera assurément celui de la confirmation d’un immense talent.

Eric Chemouny


JSM 13 Je Suis Musique Album (7)

EMMA SOLAL

« L’amour et c’est tout »

(autoproduction / plate formes officielles )

Après « Robes du soir » (2012), un premier album aux couleurs Jazzy, suivi de « Messages personnels » (2016), relecture osée et néanmoins respectueuse du répertoire de Françoise Hardy, porté sur scène avec succès (d’autant plus que la créatrice de ces chansons ne les a plus jamais incarnées depuis la fin des 60’s), le belle Emma Solal nous livre un troisième opus qui annonce la couleur : « L’amour et c’est tout ». Arborant désormais un look plus moderne et androgyne, comme en témoignent les belles images du livret signées Latizia Lefur, elle a choisi d’explorer de nouvelles couleurs musicales. Dans sa petite entreprise, la brune au charme incendiaire s’est entourée des ses fidèles complices des débuts Pierre Faa et Eric Chemouny, mais également d’auteurs compositeurs tout aussi ambitieux, comme le trop rare Jérémie Kisling, Une femme mariée, Grégory Gabriel et Nicolas Vidal, en vue de lui ciseler douze chansons originales à ses mesures vocales de rêve. Produit par Aube et Nicolas Vidal (lequel vient également de sortir comme chanteur un album de Pop à la française, « Bleu piscine », dans la veine d’un Lescop), « L’amour et c’est tout », déjà illustré par deux clips imaginatifs et très enthousiasmants signés Christophe Léopold Lafont, regorge d’ambiances envoûtantes et d’une grande sensualité à l’image de son interprète à la voix claire, mélancolique et douce comme du velours. Avec son physique d’héroïque romanesque qui n’aurait pas dépareillé dans un film de la grande époque du cinéma italien, Emma flirte sans complexe avec les musiques qu’elle aime, de l’Electro à la belle chanson française plus traditionnelle, en passant par la Pop. Capable d’incarner toutes les femmes avec une aisance déconcertante, elle se glisse dans la peau d’une amoureuse (« Un avant, un après», « Monica Vitti »), d’une narcissique démasquée (« L’amour de moi »), ou encore d’une épouse silencieuse et dévouée, restant dans l’ombre d’une star (« La femme d’une star »). Plus audacieuse que jamais, elle brouille les pistes sur le thème très actuel du « genre », en vantant les délices des « Baisers illicites ». Une réussite et la confirmation d’un talent résolument à part dans la nouvelle chanson française au féminin…

Gregory Guyot


JSM 13 Je Suis Musique Album (3)

NOLWENN LEROY

« Folk »

(Mercury / Universal)

Après le demi-succès de son album «Gemme », sans doute trop complexe et ambitieux, Nolwenn a choisi de vite remonter en selle en enregistrant un album concept de reprises thématiques, comme l’était son « Bretonne » au succès phénoménal. Sa tournée n’était pas encore terminée qu’elle est rentrée en studio pour se consacrer cette fois au répertoire Folk à la française, comme s’il s’agissait de démontrer aux derniers sceptiques que la France n’avait rien à envier aux pays anglo-saxons en la matière, et que notre pays pouvait s’enorgueillir de compter de magnifiques song-writers Folk, toutes générations confondues. Sous un somptueux visuel aux parfums bucoliques, mettant en valeur son physique parfait et son regard plus « adjanien » que jamais, la belle ex lauréate de « Star Academy », dernièrement maman d’un adorable petit Marin, 14 mois, n’a écouté que son coeur et ses souvenirs d’enfance pour sélectionner les titres composant cet opus : la qualité des chansons a primé avant tout, sans souci de savoir s’il était de bon ton de reprendre untel ou untel. Rien que pour cela, on applaudit la démarche… Et à l’écoute de l’ensemble des 13 titres, réarrangés en mode acoustique avec finesse et dans le respect des originaux, on ne peut que se laisser séduire par le charme qui opère, tant Nolwenn fait preuve de délicatesse, de respect envers les créateurs et d’humilité dans son interprétation plus sobre que jamais :  après « Je ne peux plus dire je t’aime » en guise d’hommage à Jacques Higelin, et « So Far Away From LA » de Nicolas Peyrac, premiers extraits présentés, c’est avec nostalgie et émotion qu’on redécouvre ses versions féminines de « Diabolo Menthe » d’Yves Simon (chanson générique du film culte de Diane Kurys), « Virages » d’Yves Duteil dont on a oublié le gros vendeur de disques et le chanteur populaire qu’il a été, «Ma petite fille de rêve » du regretté Jean-Michel Caradec, le standard « Je t’aimais, je t’aime et je t’aimerai » du plus folkeux d’entre tous, monsieur Francis Cabrel, « Hollywood » empruntée au cowboy du music-hall d’antan Yves Montand, « On est comme on est » de Maurice Chevalier, « La Rua Madueira » de Nino Ferrer dont on en finit plus de saluer le talent cette année, et « Marions les roses » chanson traditionnelle reprise notamment par Malicorne. Seules exceptions à ce répertoire masculin et franco-français qu’elle s’approprie à merveille, les reprises de « Suzanne » (version française du standard de Léonard Cohen, chantée par Françoise Hardy et plus dernièrement Sylvie Vartan), « Jolie Louise » de l’acadien Daniel Lanois et « Sacré Géranium » du Belge Dick Annegarn.  Bref, un joli travail d’archéologie musicale et une belle surprise qu’on espère voir bientôt portée sur scène, avec autant de simplicité et qui sait, la visite de certains des interprètes originaux…

Eric Chemouny


JSM 13 Je Suis Musique Album (5)

JULIA

« S.E.X.T.O. »

(SMART / Sony Music)

Passionnée de musique depuis l’âge de 5 ans, Julia est de cette génération de jeunes filles qui prennent des cours de chant en rêvant d’une carrière de chanteuse, puis finissent inéxorablement par tenter leur chance à un radio crochet 2.0. Avec pour beaucoup, leur lot de larmes, de désillusions, et de résignation… Sauf qu’il faut croire qu’une bonne fée s’est penchée sur son berceau, puisqu’après son passage à The Voice Kids, la jolie blonde diaphane a été repérée par la star absolue Mylène Farmer et son alter ego le compositeur Laurent Boutonnat, qui lui ont offert une chanson de leur cru, malicieusement intitulée « S.E.X.T.O ». La démarche consistant à proposer une chanson au texte osé et ambigu à une jeune fille au physique pur et innocent, n’est pas sans rappeler les débuts à succès de leur précédente protégée Alizée avec « Moi, Lolita ». D’autant que le texte de ce single joue de la même façon du principe de l’énumération des lettres du mot Sexto, approximation volontaire du mot Texto, censé incarner la jeunesse d’aujourd’hui accro aux smartphones. D’ailleurs les internautes n’ont pas manqué de relever le côté un peu daté de la chanson et de sa production, jusqu’à se demander si elle n’était pas destinée à Alizée en son temps. Quoiqu’il en soit, les fans de la belle Mylène, surtout s’ils auront été déstabilisés par la rupture de ton émanant de son dernier album « Désobéissance », ne seront pas mécontents de retrouver la plume malicieuse et coquine de leur idole, et une mélodie certes estampillée « années 2000 », mais dansante, efficace et addictive. On attend avec impatience la suite, puisque Julia prépare actuellement un premier album…

Eric Chemouny


JSM 13 Je Suis Musique Album (8)   JSM 13 Je Suis Musique Etienne Daho club

ETIENNE DAHO

« Après le Blitz » (45 tours vinyle)

« Welcome To The Club » (maxi vinyle rouge)

(Virgin / Universal)

Auréolé d’une Victoire de la Musique d’Honneur pour l’ensemble de son oeuvre (comme on dit respectueusement…), Etienne Daho est au sommet d’une carrière exemplaire. On se rappelle encore l’exposition dont l’indétrônable roi de le Pop à la française a eu les honneurs dernièrement à la Philharmonie de Paris. A artiste d’exception, régime d’exception. Collectionneur et collectionné, à la fois fan et idole lui-même, l’ami ED est un des rares dont, malgré la crise du disque, les albums et les singles successifs font l’objet de jolis collectors, luxueux et soignés dans leur conception, continuant à construire pierre après pierre l’édifice d’une discographie idéale et d’une iconographie parfaite : c’est encore le cas cet automne avec une double actu au rayon vinyle. D’abord, un maxi vinyle rouge au visuel très Queer 80’s, proposant des remixes par Sebastian, Vitalic, Italoconnection, Pierre Rousseau de Paradis, et Yan Wagner, des trois récents singles (« Les flocons de l’été », « Le jardin » et « Après le Blitz »), soit un total de six déclinaisons. D’autre part, un nouveau 45 tours, propose deux versions de la chanson « Après le Blitz » (single version et Sebastian Remix), titre hommage au fameux club londonien, le Blitz, qui a donné son titre à un album ayant quelque peu dérouté son public par son côté âpre et sombre, et sa facture plus Rock que d’ordinaire. Pour autant, on sait que ses fans seront au rendez-vous des prochaines dates de la longue tournée qu’il a entamée cet été, et passant par l’Olympia de Paris, du 27 novembre au 2 décembre prochain. D’ailleurs, est-il utile de préciser que c’est déjà complet ?

Eric Chemouny

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Bonne écoute, bonnes découvertes musicales…

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