CORINE
La naissance d’une étoile…
Corine est d’ailleurs. Une extra-terrestre, un OVNI sexy de la nouvelle scène française, une icône libre et libérée incarnant une universalité paradoxale : elle est la fille de toutes les régions qui réussit à s’extirper d’une classification de Diva Disco, d’égérie gay parisienne et bobo, en parcourant les routes de France à l’ancienne, faisant le tour des discothèques à la rencontre de tous les publics, sans aucun complexe et avec la générosité de la chic fille, de la bonne copine avenante et volontaire qui joue volontiers les fausses nunuches, tout en levant le poing, façon girl power dominant.
Qui est vraiment Corine ? supercherie marketing ou hallucinante révélation artistique ? On ne le saura jamais, en tout cas pas tout de suite… Et puis, le veut-on réellement, d’ailleurs ? Mystérieuse, intrigante et secrète, Corine n’est pas qu’un personnage fabriqué pour le papier glacé, les microsillons et les dancefloors, pas plus que pour les hipsters en mal de stars, ou pour les ados excités par les doubles pages des vieux magazines de charme, mais c’est (déjà) une icône adulée, une nouvelle madone populaire et underground à la fois, ni vraiment revenue du passé dans lequel elle est pourtant taillée, ni totalement inscrite dans un présent acidulé.
Cette amazone ultra solaire est un espace temps à elle toute seule, une créatrice, une séductrice, une lionne de velours, une sirène extatique, une déesse de la scène au corps sylphide, belle de jour et nouvelle reine de la nuit, et par dessus tout : LA femme dans toute sa splendeur et dans toute sa beauté. C’est une déterminée, une ambitieuse, une victorieuse en même temps qu’une hédoniste, qu’une gourmande, qu’une épicurienne. Tout son être met en marche sa propre révolution, moderne et libre, poursuivant le travail des jalons posés en leur temps débutants par la jeune Louise Ciccone devenant Madonna dans les rues d’un New York arty , par une Stefani transfigurée en Lady Gaga ou par une Mylène passant de Gautier à Farmer qui ont toutes à leur façon construit, comme Corine aujourd’hui, leur propre mythe, distillant ce subtil mélange de légèreté des plaisirs tout en embrassant la gravité d’un monde en déconstruction.
Aujourd’hui, en tout cas, on en est là avec Corine : on assiste à la naissance d’une étoile, dans la trajectoire exacte de ses illustres aînées, encore chrysalide intersidérale dans une galaxie de stars. Passage transitoire puisqu’après un EP remarqué et quelques remixes de bon goût, après avoir exposé sa crinière d’or dans toutes les rubriques des magazines branchés à coups d’images décalées, contrôlées et léchées, y compris un questionnaire de Proust original dans JeSuisMusique (à relire ici) , après quelques happening et performances notamment chez Rykiel ou dernièrement au Grand Palais pour l’événement Hermès, et enfin quelques tours de chauffe sur les routes nationales du pays dans des nightclubs surréalistes, Corine a signé chez Polydor, l’un des labels d’Universal Music.
La label, tel un pacte scellé, a ressorti en février dernier ses précédentes productions et a marqué un premier coup maison avec “EP 2”, sorti le 13 avril dernier, qui répand une vague de tubes de l’été, dévastateurs pour toutes les autres saisons en attendant un premier véritable album prometteur. Corine remonte le temps et le mélange dans une supernova musicale réjouissante : “Il fait chaud” est un hymne presque piqué aux années 80, “Pluie Fine” est un tube ambiant techno qui ferait rougir le meilleur des années 90, “Cocktail”, une bande son au ralenti tout droit sortie d’une scène érotique d’un film de David Lynch, “Pourquoi Pourquoi” et sa reprise italienne “Perche Perche” qui sont déjà des classiques, inspirés des années 2000 mais surtout la cerise sur ce rainbow cake : la chanson néo-disco: “Epopée Solaire”, duo girly sexy avec… Juliette Armanet, un tube qui drague volontiers la perfection d’un “Fade to Grey” (de Visage) en tutoyant très haut les étoiles et qui achève de consacrer cette nouvelle lionne de la Pop venue d’ailleurs.
Pour célébrer cette sortie, Corine donnait son premier “vrai” concert parisien, complet, aux Etoiles de Paris, petite salle du 10ème arrondissement, à la fois désuète et rococo, avec juste ce qu’il faut de décadence et d’ambiance de club torride.
C’est avec des pommes d’amour, des sucettes et des bonbons distribués par ses Coco boys, que nous patientons au son de titres Disco improbables et oubliés (en tête, ce “Demon de minuit” de Rick Albano, ça ne s’invente pas!) . C’est dans le public qu’elle débarque, sublime fée de feu, éclairée à la lampe torche, entourée de deux danseurs en combinaison blanche sur le tubesque “Stop ou Encore”. Evidemment, c’est “encore !”, quelle question ! Elle traverse les garçons et les filles déjà en sueur et monte sur la petite scène en alcove, seule tandis que ses danseurs restent parmi la foule. A coups de poses lascives et statufiées, elle est stupéfiante en déesse des dancefloors , sublimée par un éclairage qui l’enrobe et la met dans un écrin divin hypnotique. Ses danseurs la rejoignent ensuite et avec les musiciens en shorty, ils ne sont pas moins de 8 à occuper l’espace, serrés comme dans une rame de métro parisien.
Devant ce spectacle confiné, on se met à penser à ce qu’aurait été le show s’il avait eu plus d’envergure, bénéficié de plus d’espace, si Corine avait poussé jusqu’à l’extrême l’extravagance de son univers, le jusqu’au boutisme de cette femme pailletée à l’armure satinée. Ne laissant rien au hasard, malgré une apparente décontraction, ses chorégraphies spatiales aux mouvements aquatiques illustrant les 11 titres Disco chic de la setlist auraient néanmoins mérité davantage d’espace d’expression. Contre toute attente, elles sont pourtant des petits bijoux de scénettes mimées avec ses danseurs, subtiles et intelligentes tant elles en sont presque imperceptibles.
Ce premier rendez-vous est un déferlement de promesses : c’est Corine que l’on est venus voir, et elle est là, presque offerte toute entière devant nous et nous assistons, là, et comme rarement, à l’éclosion d’une étoile, d’une vraie, pas de celles qui sont filantes dans la galaxie musicale à la vitesse d’une étincelle foireuse. Corine est de celles qui brillent, qui scintillent dans le ciel de nos jours et de nos nuits, de celles qui osent éblouir à coups de chansons magnétiques et dont on entrevoit l’immense potentiel dans une expansion créatrice sans limite, bien qu’ici techniquement restreinte. Elle est la vraie nouvelle reine de la nuit, de la Pop et du Disco.
Corine a commencé son tour de piste dans le public, et et la bouclette est bouclée: c’est le public qui monte sur scène pour un final déchaîné sur “Perche Perche”, ultime version italienne de “Pourquoi Pourquoi”.
Sur scène comme sur disque, Corine en a encore sous le talon compensé et c’est sûrement la meilleure nouvelle des étoiles. Modèle unique, celle qui ne prend la place de personne, alors rectifions: elle n’est pas seulement la nouvelle reine de la nuit, de la Pop et du Disco: elle est LA vraie nouvelle star venue d’ailleurs. Elle est le futur.
Gregory Guyot.
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Crédit photos: Pierre Olivier Signe (D.R) // Gregory Guyot (D.R. / @I_am_Gregg / JSM)
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Setlist des Etoiles, 13 avril 2018 : Stop ou Encore / Pluie Fine / Un air de fête / Pourquoi Pourquoi / René Maurice / Corine / Cocktail / Il fait chaud / Marche Nocturne / Encore : Bingo / Perche Perche .
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