19 eme MONTREAL EN LUMIERE
le Québec dans l’âme…
Du 22 février au 4 mars dernier, la métropole canadienne vibrait au rythme de la 19éme édition du festival Montréal en Lumière. A la croisée de la gastronomie, des activités de plein air et des spectacles vivants, le plus grand festival d’hiver est avant tout une incroyable vitrine de l’âme et de la culture du Québec dans ce qu’elle a de plus vivace, novatrice et créative. JSM était de la fête, et a pu se réchauffer à sa programmation musicale ambitieuse, riche et éclectique …
Vu de France, on connait surtout Montréal pour ses grands festivals d’été, des Francofolies de Montréal au Festival de Jazz, ou encore pour son festival d’humour, Juste pour Rire. Depuis presque 20 ans, c’est pourtant en plein coeur d’un hiver très rigoureux que se déroule une des plus populaires manifestations québécoises avec Montréal en Lumière, attirant désormais chaque année près d’un million de visiteurs sur deux semaines. Créé en 2000, l’idée de départ était simple, mais loin d’être un succès assuré : il s’agissait d’insuffler une énergie nouvelle, de retrouver un esprit festif, une joie de vivre et de l’animation en centre ville, à une période de l’année où Montréal est au plus bas de son affluence touristique, et alors que les habitants rechignent à sortir de leur tanière, la neige et le froid régnant sur la ville blanche. Autant dire que le pari est aujourd’hui plus que relevé…
Première volet et pas des moindres, c’est la gastronomie que MEL met prioritairement à l’honneur : devenu le rendez-vous annuel incontournable des foodies et autres grands chefs mondiaux, l’édition 2018, célébrait les 50 ans de l’Institut du tourisme et de l’hôtellerie du Québec, proposant une série de conférences, de circuits, de laboratoires et d’évènements gastronomiques, comme les Bonnes Tables d’Air France, offrant toute une gamme d’ateliers culinaires dans un espace dédié. Plus simplement, on pouvait tout aussi savourer une bonne poutine, des Queues de Castor, ou des gaufres dans l’un des nombreux foodtrucks sur le site de la Place des Arts, où se concentrait l’essentiel des animations, ou encore découvrir l’univers de l’érable et de son fameux sirop, se délecter de produits grillés sur Braseros (saucisses, guimauves…) ou encore visiter le Mondial des Cidres SAQ, dans l’espace Desjardins à deux pas.
Histoire de brûler des calories, les plus sportifs ou téméraires, pouvaient s’essayer au survol du site en Tyrolienne, se laisser aller sur des toboggans glacés (les fameuses glissades du Lait), apprendre les rudiments du Hockey, sport national, ou du ski de fond dans l’Espace Olympique… Et pour les rêveurs contemplatifs, plus tranquillement admirer la ville du haut de la grande roue illuminée : vue magique assurée !
Côté culture, alors que tous les buildings de la ville se paraient de couleurs festoyantes, et après une première édition présentée en 2017 par le Casino de Montréal, Iluminart proposait un parcours autour de la place des Festivals, permettant d’apprécier des oeuvres et installations temporaires de créateurs, vidéastes, ingénieurs, et autres artistes graphiques, autour du thème de la lumière : quand la technologie se met au service de la féérie, on adore… Sans oublier la Nuit blanche du 3 mars, qui clôturait royalement l’événement au moyen d’innombrables activités, près de 200, réparties sur 9 pôles à travers la ville : et les amateurs de musique étaient loin d’être oubliés ce soir-là, puisque c’était, entre autres, l’occasion de visiter la splendide exposition « Une brèche en toute chose », consacrée au montréalais Léonard Cohen au Musée d’Art Contemporain de la ville (avec une magnifique affiche signée du français Claude Gassian), de visiter gratuitement le musée Grévin local où les Popstars ont toute leur place (à commencer par Céline Dion, bien sûr), de danser au son des meilleurs DJ de la planète réunis pour 24 Hours of Vinyle à l’édifice Wilder-Espace Danse, d’écouter le britannique bluesman Jack Broadbent à l’Astral, ou encore d’aller écouter Marie-Pierre Arthur mixer au Café, situé sur le fameux boulevard Saint-Laurent, tant célébré par Diane Tell, le temps d’un « cabaret festif ».
Et comme Montréal est Musique, difficile d’imaginer un festival censé représenter l’âme d’une ville et de ses habitants, dans toutes sa richesse et sa diversité, sans une bande-son éclectique à la hauteur de l’évènement. En plus de spectacles de danse et de théâtre, c’est donc à une programmation musicale internationale, piochant dans le meilleur du Hip-hop, de la chanson, du Folk, du Rock du Jazz ou même du Flamenco, que nous conviait Laurent Saulnier, vice-président de la programmation.
Et puisqu’il fallait choisir, entre autres invités prestigieux, signalons qu’on pouvait applaudir le 22 février, la délicieuse Ala.Ni, venue présenter les délicates chansons de son album « You and I », dans le cadre intimiste du centre Gesù, une église devenue une jolie salle de spectacles. Le lendemain, ce sont Karen Young et Coran Egan, qui y présentaient ensemble le spectacle « Mère et fille », revisitant leur répertoire respectif, mais aussi des standards Pop, Folk ou Jazz. Ce jour-là (et le lendemain), la Compagnie Créole, quant à elle, fêtait ses 30 ans de carrière au Québec, dans le chaleureux théâtre Saint-Denis, devant un public venu nombreux. Il faut dire que la métropole cosmopolite compte une importante population issue des Caraïbes, au point que le passage du groupe aux Francofolies fut un des plus gros succès du festival, il y’a quelques années…
Le 22, également la grande dame de la chanson québécoise, Marie-Denise Pelletier, rendait hommage à la légende Claude Léveillée, au théâtre Outremont, dans une création intitulée « Léveillée, entre Claude et moi ». Dans ce charmant espace, quatre figures de la variété québécoise se sont donné rendez-vous également : Martine St-Clair (on se rappelle sa collaboration en France avec Marc Lavoine dans les années 80), Luce Default, Marie-Michèle Desrosiers et Marie-Elaine Thibert, pour un spectacle intitulé « Entre vous et nous ». Le 1er mars, c’est Andréa Lindsay qui s’y produisait pour un spectacle « Entre le Jazz et la Java » (clin d’oeil à Claude Nougaro), puisant dans les standards du Jazz francophone. Sans oublier le grand Daniel Lavoie, revenu de l’aventure « Notre-Dame de Paris », qui y présentait son nouvel album « Mes longs voyages », le 2 mars, ainsi que ses plus grands succès, entouré de six musiciens.
Le 27 février, on assistait à un des événements majeurs au théâtre Maisonneuve, où la charismatique Marie-Josée Lord incarnait les grandes femmes de l’Opéra à travers les siècles, accompagnée de l’orchestre symphonique de Laval, dirigé par Alain Trudel. Au programme, la sympathique et truculente Soprano avait choisi de reprendre avec majesté les « tubes » de Puccini, Verdi, Massenet et bien d’autres titres figurant sur son album « Femmes » qui vient de sortir : une standing ovation raccompagnait l’atypique Diva d’origine haïtienne dans les coulisses…
Le 28 février, au Mtlelus, c’est la rebelle new-yorkaise LP que les Montréalais les plus fans attendaient depuis 18 heures, sur les trottoirs verglacés de la rue Sainte-Catherine pour être sûrs de pouvoir l’acclamer aux premiers rangs. Ukulélé à la main, après avoir écrit pour Rihanna, Cher et les Backstreet Boys, elle a enflammé un public conquis par sa voix rauque, en agitant ses boucles brunes, notamment au son de son hit « Lost On You ».
Le 1er mars, le très populaire Vincent Vallières, alternait moments intimistes et d’autres plus rythmés sur la scène de l’Astral, dans une formule scénique assez ramassée. Le lendemain, c’est le sympathique Patrice Michaud qui se produisait au théâtre Maisonneuve. Très élégant dans son costume-cravate, accompagné d’un groupe très looké « Mods 60’s » également, il a été sacré interprète masculin de l’année au dernier gala de l’ADISQ. Au terme d’une tournée de 90 dates, il donnait ici son dernier concert, en forme de consécration d’une année bien remplie, auréolée du succès de son troisième album, « Almanach », bourré de succès radio comme « Kamikaze », ou « Julie revient, Julie s’en va ». Avec beaucoup d’humour et d’autodérision, il a fait preuve d’une vraie aisance scénique (avec la complicité de Yann Perreau) et d’un pouvoir de séduction incontestable, au point qu’il ne serait pas étonnant de le voir débarquer en France prochainement…
Le même soir, la présidente d’honneur du festival et enfant chérie du pays, Isabelle Boulay, chantait au théâtre Maisonneuve : après le triomphe ici de son album consacré à Serge Reggiani, elle présentait les chansons de son nouvel opus « En vérité » réalisé par Benjamin Biolay, devant un public de fidèles qui la suit depuis 25 ans maintenant.
Enfin, le samedi 3, alors que la fête battait son plein à l’extérieur pour la fameuse « Nuit blanche », la gracile chanteuse Jazzy Stacey Kent dévoilait les titres de son tout dernier album, entrecoupés de standards de son répertoire en ce même théâtre Maisonneuve, dont elle a fini par faire un moelleux cocon, entourée de ses musiciens, parmi lesquels son mari avec lequel elle joue d’une vraie complicité scénique. Avec son allure de garçonne androgyne et filiforme, habillée d’un veston doré très élégant, Stacey déployait ce soir-là tout son charme franco-américain…
A n’en pas douter après une tel record d’affluence, aidé certes cette année par des températures quasi-printanières, alors que paradoxalement un froid sibérien sévissait sur l’Europe, Montréal en Lumière mettra les bouchées doubles du 21 février au 3 mars 2019, pour la 20éme édition du plus spectaculaire festival d’hiver… Nous y serons, et vous ?
Eric Chemouny
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crédit photos: Affiche Montréal en Lumière (D.R.) // Photo couleur LP par Eliane Levesque (D.R./ Spectra) // Photos Ala Ni, Vincent Vallières par Benoit Rousseau (D.R.) // Photos Musiciens, Marie Josée Lord par Victor Diaz Lamich (D.R./Spectra) // Photo LP par Susan Moss (D.R.)
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