CATHERINE RINGER :
Senior ou Senorita ?
Annoncé par l’extrait « Senior », véritable ode à la fleur de l’âge et au bonheur de voir passer le temps, la voix des Rita Mitsouko, signe un deuxième album solo, « Chroniques et fantaisies » qui vient prouver qu’elle n’a au contraire rien perdu de son tempérament gouailleur et juvénile, plein d’énergie, de fraîcheur et de folie. L’expérience du chagrin et la mélancolie en plus…
Entièrement écrits et composés par Catherine Ringer elle-même depuis 2015, pendant la longue tournée de concerts de Tango au sein du groupe Plaza Francia avec Gotan Project, achevée au printemps 2017, les 12 titres de « Chroniques et fantaisies » se veulent inclassables, entre chanson française, Funk, Rock, Electro et Pop. Sans faire appel a des « boucles » si prisées par les temps qui courent, mais plutôt jouées avec tout une batterie d’instruments électriques, électroniques ou acoustiques, les chansons n’ont pour seule ambition, selon l’intéressée elle-même, que d’être écoutées et de faire danser, dans un joyeux méli-mélo de matières et d’ambiances, habillant des chroniques et autres saynètes pleines de drôlerie et de fantaisie certes, mais aussi nourries d’émotions très personnelles. Au point que cet album, bien plus réussi que le précédent « Ring’n’Roll » (2011) un rien chaotique et encore trop marqué par le bouleversement de sa vie personnelle, a failli s’intituler “La Cuisine de Tatie Cathie”, tant la chanteuse assimile la confection d’un album varié à l’élaboration d’un menu par un chef cuisinier.
Et c’est sur scène qu’elle a choisi de faire d’abord exister, depuis octobre 2016, cet album conçu dans la joie et le partage, avec l’ingénieur producteur Azzedine Djelil et l’arrangeur Noel Assolo. Sans oublier son fils Raoul Chichin qui, de son côté, connait un joli succès avec sa sœur Simone, au sein du groupe Minuit, et qu’elle a invité à venir jouer sur des parties de guitares. Et force est de constater que 10 ans après la disparition de Fred Chichin, celle dont de nombreuses chanteuses de la nouvelle génération se réclament (la talentueuse Fishbach en tête), a réussi à imposer sa griffe en solo, tout en restant fidèle à l’esprit des Rita Mitsouko, et sans rien perdre non plus de sa voix singulière, ni de son interprétation précise et toujours inattendue.
Plus de trente ans après ses débuts, Catherine Ringer demeure pour beaucoup l’incarnation d’une chanson française résolument moderne, hors-modes et d’une inventivité dingue : en témoigne une jolie farandole de chansons très mélodiques et aussi variées que « Sénior » sur le thème d’un troisième âge qu’elle aborde avec malice et une grande sérénité (« Sénior, j’adore…! »), « Fier-à-bras (Essaouira-Paris)» souvenir aux accents Rock d’un voyage au Maroc, « Leur amour » virevoltante valse sur laquelle on se laisse emporter avec délice, « Obstination » chanson politique destinée à éveiller les consciences et faisant écho au succès des Rita « Le petit train »,« La petite planète » aux faux-airs de comptine héritée de l’enfance, la charmante et désuète « Sourire d’automne », ou encore l’émouvante « Tristesse » sur laquelle elle rend un vibrant hommage à Fred, dont la présence bienveillante semble finalement avoir inspiré tout l’album.
« Le temps nous sépare, mais répare aussi ma vie », lui adresse-t-elle pudiquement, comme un ultime aveu du manque terrible qui est le sien, au-delà de l’élégance et de la dignité dont la Reine Catherine a toujours fait preuve.
Eric Chemouny
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crédit photos : Laura Lago (D.R/ Because Music) extérieurs et Studio vert // Charles Freget (D.R/ Because Music) dans le studio orange
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