PIERRE LAPOINTE :

le cœur à nu.


Pierre Lapointe est musique.

A l’occasion de la sortie de son album « La science du coeur », Je Suis Musique a rencontré la star de la chanson francophone au Québec. Véritable homme-orchestre, passionné et passionnant, il s’est entretenu avec sincérité sur la genèse de ce nouveau projet, se livrant sans fards sur sa conception originale de son métier, et sa vision très personnelle de l’humanité et des choses de l’amour, son inépuisable source d’inspiration…

– Dans quel état d’esprit es-tu à la sortie de ce nouvel album « La science du coeur » ?

Je suis très fier : les premiers articles ont commencé à paraître, et j’ai le sentiment que le message n’est jamais si bien passé. C’est une grande satisfaction. Au début de ma carrière, j’insistais sur le fait que je ne suis pas seulement chanteur, mais aussi directeur artistique, créateur au sens large. Mais n’ayant encore rien fait, les gens ne comprenaient pas trop dans quelle direction je voulais aller. A force de produire des spectacles événementiels, mon style s’est affirmé auprès du public, et d’autant plus depuis que j’ai co-réalisé et assuré la direction artistique de mes deux derniers clips.

– C’est la première fois qu’un de tes disques est distribué par une major, Columbia, Sony Music : c’est une source de pression supplémentaire ?

Non, au contraire, j’ai l’impression d’avoir une locomotive de plus. Je travaille depuis longtemps avec Thierry Langlois chez Uni T, et Brigitte Batcave à la com’. qui sont devenues des entités très solides. Côté maisons de disques, ça a toujours été plus compliqué : je suis tellement allé dans tous les sens sur mes albums, qu’il était devenu difficile pour elles de me classer dans un créneau facile et rassurant. Mon association avec Columbia ne peut aujourd’hui que m’aider et me propulser. Je constate que ça apporte une crédibilité supplémentaire à mon travail, qui consiste à faire des chansons et répondre à des entrevues : mieux je suis accompagné, mieux c’est pour moi.

– Pourquoi avoir voulu travailler avec un français, l’arrangeur et compositeur David-François Moreau ? Est-ce pour son travail pour son frère Patrick Bruel (chante Barbara) ou pour apporter une French touch ?

Je n’ai su l’existence de l’album sur Barbara qu’après avoir approché David. En fait, je ne savais pas du tout ce qu’il avait fait avant. Il est venu voir mon spectacle « Paris Tristesse » à la maison symphonique de Montréal pendant les Francofolies. Il m’a écrit un message qui m’a touché et embarrassé, car je ne le connaissais pas. Il voulait qu’on se rencontre et je n’en ai pas eu le temps, mais j’ai appelé Albin de la Simone pour lui demander de m’éclairer. Il m’a répondu que non seulement il le connaissait, mais qu’ils étaient très bons amis. Il a donc organisé une rencontre chez lui à Paris. J’ai appris qu’il avait travaillé avec des chorégraphes, fait des musiques de films, et qu’il avait des connaissances dans la musique classique, comme compositeur et arrangeur. Je suis ensuite parti au Japon et j’ai écouté tout ce qu’il avait fait sur son site internet. Ses musiques de films ou pour le théâtre m’ont beaucoup intéressé. Il se trouve que depuis longtemps, j’avais envie de faire le pont entre la musique classique contemporaine et la grande tradition de la chanson française. Je n’avais pas les connaissances pour cela, et je cherchais la bonne personne. En écoutant sa musique, je me suis dit que j’avais trouvé la personne idéale. Le fait qu’il soit français n’a pas influé. Humainement, j’ai senti une connexion et artistiquement, il était exactement ce que je cherchais.

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– Pourquoi le choix de Pascal Blanchet pour la pochette aux accents 80’s hyper-réalistes ?

Pas seulement. Aux années 40 et 50 également. C’est un travail de collaboration. Pascal est un illustrateur québécois qui vient de travailler sur les décors du prochain film de Wes Anderson. Il a fait beaucoup d’illustrations pour le New-Yorker. J’aime son travail, parce que comme moi, il utilise des codes du passé : il est spécialiste du Streamline, de l’Art Déco, et de l’illustration des années 60 et il en fait quelque chose de très actuel. On a beaucoup discuté du code couleurs, etc. C’était la première fois qu’il réalisait un décor en 3D. D’ordinaire, il ne fait que du dessin. Il a réalisé des esquisses extrêmement précises : on aurait dit un plan d’architecture. Ça s’est déterminé au fur et à mesure… Ensuite, on a décidé de tourner le clip « La science du coeur » dans ce décor, sous forme d’un plan séquence. On a rajouté une partie en modélisation 3D à partir de son travail sur la fin du clip. Pour celui de « Sais-tu vraiment qui tu es », on a juste pris ses illustrations et on les a faites s’animer par un illustrateur.

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– Ton intention de départ était de faire de l’art pointu pour le peuple, à la façon de Kurt Weil : as-tu le sentiment que l’on méprise le public et sous-estime son intelligence, son bon goût ?

En tout cas, c’est le cas pour les médias de masse, au Québec comme partout dans le monde. Les gens se complaisent dans la facilité. On est rendus dans une espèce de climax qui commence à être dangereux, et dont l’élection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis est la première expression. Le pouvoir de l’image et des réseaux sociaux a pris trop de place. On est entrés dans une époque où les gens s’auto-félicitent d’exister. Ils deviennent narcissiques et publient des archives de leur vie au quotidien à outrance, alors qu’il n’y a absolument rien d’extraordinaire dans le fait d’exister. Je fais un métier public, et je suis bien placé pour voir la paresse des médias, et constater comme les gens à la tête de ces médias refusent de jouer le rôle d’éducation massive qu’ils pourraient avoir avec leurs outils, pour rendre l’être humain plus beau. Ce qui me rassure, c’est qu’en dehors des réseaux sociaux, Internet nous permet d’élargir nos connaissances et d’être plus intelligents. Mais il faut avoir une grande capacité de jugement et de tri des informations. Tout cela finit par avoir un impact au niveau artistique sur les choix des maisons de disques qui veulent que leurs artistes soient vus et entendus. C’est malheureux, mais aujourd’hui, la seule façon de voir la planète est de la voir avec des lunettes économiques ; c’est aussi très dangereux. L’éducation n’est pas économiquement rentable a priori. Sauf qu’à partir du moment où on place l’éducation et la culture au premier plan, on a moins de problèmes sociaux, de santé publique, etc. Les gens sont globalement plus heureux. Or actuellement, seule compte l’économie. Je me demande si on n’a pas atteint un point de non-retour. Heureusement, certains artistes font de la résistance : je reste convaincu que l’être humain est fondamentalement sensible et intelligent, et qu’avec le temps, on arrive à concerner beaucoup de gens. Avec mon spectacle « Amours, délices et orgues » aux dernières Francofolies de Montréal, on a vendu un nombre incroyable de billets… On a été adoré et détesté, ce qui est tout à fait normal. En dehors du soir de la première à Montréal et Québec, cela a été l’occasion de longues discussions avec le public après le spectacle. Parfois jusqu’a 100 personnes restaient dans la salle. On n’en revenait pas de la qualité de l’échange : les questions étaient souvent brillantes, intelligentes… Pour moi, le geste artistique est là pour provoquer une réaction, positive ou négative. Dès lors que la personne s’interroge pour savoir comment se positionner par rapport à l’oeuvre ou l’objet, le geste artistique est justifié. Je suis dans ce positionnement payant à long terme, même si a court terme, ça demande plus de mobilisation. En particulier chez nous au Québec, où le niveau de culture général est moins élevé qu’en France. En contrepartie, on a davantage de liberté artistique au Québec, parce que les gens arrivent avec moins d’a priori.

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– L’album est relativement court, 37 minutes, et tu invites à l’écouter sans interruption : c’est un peu anachronique comme démarche, à l’heure de la consommation numérique de la musique !

Oui,mais je persiste à prétendre que la chanson a la même capacité, la même charge artistique qu’une grande oeuvre littéraire, théâtrale, chorégraphique ou visuelle. Et pour y arriver, il faut placer les barrières un peu plus haut. La chanson a été déformée avec sa dématérialisation, sa consommation rapide et notre manque d’attention collective, notre déficience a rester plus de 5 secondes sur quelque chose. Tout l’album a été travaillé à l’ancienne. Je trouvais intéressant de mettre au défi les gens qui m’écoutent, de tenir loin leur appareil téléphonique, et de l’écouter aussi à l’ancienne. On peut toujours jouer avec l’ordre des chansons ensuite, mais pour une première écoute, il faut respecter sa construction. C’est comme un spectacle. Quand on a construit le disque, on a du écarter trois chansons, justement pour être le plus court possible. On avait d’abord envoyé en vrac toutes les chansons à une vingtaine d’amis en leur demandant de les classer par ordre de préférence de 1 à 14. Ils ont voté, on a instauré un système de points, et on a gardé les 11 premières. C’était un peu une étude de marché, à petite échelle, puisqu’on a consulté des gens plus ou moins connaisseurs de musique. Ensuite, j’ai proposé un ordre a l’équipe qui l’a trouvé parfait. On n’a fait le mix de l’album qu’à partir de cette construction. Je suis très heureux parce que les gens qui ont écouté l’album m’en parlent avec beaucoup d’émotion : ils ont été transportés, exactement comme je l’espérais.

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– Comment est née cette chanson, « La science du coeur », qui donne son titre à l’album ?

C’est la première chanson du projet qui est arrivée, il y a 4 ou 5 ans. « Punkt » venait de sortir, quand j’ai commencé à l’écrire. Elle était plus longue, moins structurée, mais j’avais déjà cette pièce. A mon retour du Japon, en escale à Paris, je suis passé voir David, pour lui faire écouter la chanson en piano-voix. C’était pour moi un peu la suite de « Nos joies répétitives ». La phrase « la science du coeur est un objet d’attraction propulsé par la volonté qu’ont les gens tristes à se laisser toucher » est arrivée assez vite. Je trouvais assez belle l’idée que les gens qui se laissent aimer sont des gens faibles et tristes. On n’a pas besoin d’être aimés sinon. J’ai eu envie d’écrire sur un personnage qui n’a pas connu l’avant et l’après réseaux sociaux. J’ai assez de détachement pour voir à quel point les gens sont habités par cette obsession. C’est extrêmement épuisant en fait. J’ai travaillé dans cette optique. Cette chanson est presque un manifeste : elle parle de l’image physique, qu’on peut contrôler par le vêtement ou l’assurance qu’on peut avoir en soi, mais aussi de l’éphémère du corps. Quand j’ai écrit mon premier disque, j’étais concierge dans un foyer pour personnes âgées, pendant deux ans. J’écrivais l’album pendant mes heures de pause. Ce n’est pas pour rien que je parlais des vieillards incontinents sur la chanson « Place des Abbesses ». J’ai aussi accompagné quelqu’un de très proche dans la vieillesse. Si bien que quand on se dit choqué, parce que je parle des « couches qui débordent » sur « La science du coeur », je me rends compte que cette réaction provient de gens qui n’ont jamais connu cette situation. Je leur réponds qu’un jour, s’ils ne meurent pas du cancer avant, ils auront aussi à porter une couche. C’est un peu brutal, mais c’est la vie : j’aime bien nommer ces choses-là. C’est un peu mon métier, même si certaines personnes sont mal à l’aise avec ça. Cela dit, beaucoup me disent aussi que ça les replonge dans des souvenirs douloureux, mais que la chanson leur parle : on apprivoise une situation en la nommant.

– As-tu conscience que sans refrain ni couplet, avec son rythme crescendo, c’est une chanson un peu casse-gueule par les temps qui courent…

Oui, elle commence par le bruit du vent, en clin d’oeil à un de mes films préférés de Fellini, « Juliette des esprits ». J’aimais bien l’idée de commencer un disque en plaçant la voix dans un espace temporel et physique difficile à définir. On ne sait pas si on est dans le désert, ou si c’est l’hiver. On a aussi l’impression que je chuchote à l’oreille de l’auditeur : c’est assez saisissant. C’est de la mise en scène en fait.

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– Ecrire des chansons d’amour t’a-t-il permis de mieux comprendre cette science du coeur et le fonctionnement amoureux ?

Je ne sais pas si ce sont les chansons qui m’aident à comprendre l’amour. Je me vois simplement comme un observateur : je regarde autour de moi, comment je vis, comment je réagis. Le sentiment amoureux est un sentiment extraordinaire, le plus grand qu’on puisse ressentir en tant qu’être humain. Je le vois aussi avec mes amis qui ont eu des enfants, et me disent combien l’amour peut prendre alors des proportions inconditionnelles. Je n’ai toujours pas vécu cette expérience, que je vivrai peut-être un jour. Le sentiment amoureux induit beaucoup de projections de nous-mêmes sur l’autre, qui peut conduire rapidement à une forme de complaisance. Chaque expérience amoureuse que je vis ou que j’observe autour de moi, finit par être un mini laboratoire, très fascinant, très riche, même si c’est douloureux. J’essaie au travers des chansons de toucher à des petits moments universels.

– Est-ce pour toi une forme de thérapie pour surmonter des chagrins d’amour ?

Non, mais j’ai l’impression que la chanson fait de moi un meilleur être humain. C’est aussi beaucoup lié à la scène. On finit par accepter que parfois les choses n’arrivent pas facilement, et que d’autres fois, elles se déroulent merveilleusement bien. On a beau être préparé, ça ne change rien. La scène m’a appris le lâcher prise et une forme de détachement par rapport à la vie. Tout cela a fait de moi quelqu’un de plus fort et à m’a conduit à m’affirmer. L’être humain n’est véritablement heureux qu’en étant qui il est. Ce métier m’aura apporté cela. En ce sens alors, c’est une thérapie. Parce que sinon, je trouve l’être humain très déprimant, et la vie très inutile. Je l’ai souvent dit et je le pense profondément. Le fait de créer et de monter des projets ambitieux est une façon de me réconcilier avec cette inutilité, parce qu’en allant vers l’autre et en cherchant au sein d’un groupe, j’ai l’impression de faire un peu évoluer l’art, la chanson, le design, l’oeil du public, à ma petite échelle. Et surtout, j’ai l’impression de vivre en communion avec d’autres êtres humains. J’apprends à aimer et à trouver ça beau.

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– La chanson « Alphabet » est un OVNI : comment est-elle née ? Faut il y voir un autoportrait lexical ?

C’est un hommage à Amanda Lear, qui a fait une chanson sur ce thème, que j’aimais beaucoup et que j’ai beaucoup écoutée. Je trouvais l’exercice extrêmement intéressant et j’ai voulu reproduire à ma façon, cet hymne à sa génération, qui ne parlera peut-être pas à tout le monde. Faire référence à une artiste comme elle collait bien à mon idée de faire du postmodernisme. La culture c’est tout et rien en même temps. Or pour moi, elle est un élément culturel extrêmement riche, même si ce n’est pas la plus grande voix de la planète. Elle a rassemblé autour de son personnages beaucoup d’énergies artistiques et sa carrière Disco est quand même assez drôle. J’ai décidé de prendre une mélodie que j’avais et faire une boucle comme dans le hip hop, en diversifiant les arrangements autour de cette ligne-là. Je ne sais pas si c’est un autoportrait, mais elle dit pas mal de choses qui aident à comprendre qui je suis devenu pendant ces 15 dernières années. C’est aussi une façon de stimuler la curiosité des gens à mon sujet, en citant quelques références. Moi-même, quand je regarde un documentaire sur des artistes que je connais pas, je marque une pause pour me renseigner, écouter ce qu’ils ont fait, avant de reprendre la lecture…

– As-tu rencontré Amanda Lear ?

Non, mais j’ai beaucoup d’admiration pour elle, même si on ne la connait pas du tout au Canada. Je l’ai découverte ici par des amis français. J’aime bien l’idée de passer d’un univers très Pop à un univers plus intello et rendre hommage à cette chanson-là. On s’est écrit déjà, quand je faisais mes chroniques sur France Inter, parce qu’elle devait venir chanter avec moi : ça ne s’est pas fait, car elle voulait juste chanter en anglais pour faire la promotion de son album sur Elvis Presley. Je ne sais pas si elle connait même l’existence de cette chanson… (N.D.L.R : JSM s’est chargé de passer le message à Amanda Lear depuis, et ils sont entrés en contact).

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– Quelle est la part d’autobiographie de chansons intimistes et sentimentales comme « Retour d’un amour » ou « Comme un soleil » ?

Il y a de moi partout, dans toutes les chansons. Après, j’écris des romances qui ne se cantonnent pas à mes expériences, à ma vie. Ce serait ennuyeux sinon. Ce que j’aime bien, maintenant que j’insuffle un peu de réalisme dans mes chansons, en faisant beaucoup de citations notamment culturelles, c’est de magnifier les choses, de brouiller les pistes entre ce que j’ai vécu, ce qui est fantasmé, ce qui est exagéré ou minimisé. J’embrasse cette démarche avec beaucoup de plaisir.

– « Retour d’un amour » sonne très Véronique Sanson, ou même Michel Polnareff…

En écrivant cette chanson, j’ai effectivement beaucoup pensé à de gros succès Pop, comme ceux d’Elton John, Véronique Sanson ou Michel Berger. Elle se réfère à une époque où même Bowie, avait cette façon de clamer sur les paroles. C’est une chanson très romantique, dont beaucoup de personnes me disent qu’ils ressortent bouleversés de son écoute. C’est pourtant une chanson qui s’est imposée toute seule dans son écriture, sa tonalité, comme si elle existait et que je n’avais eu qu’à aller la cueillir. Je l’ai écrite comme sous la dictée. C’est du gros romantisme, très classique. J’avais des réticences à garder la phrase : « c’est le retour d’un amour que je croyais perdu, la nouvelle page d’un livre que je croyais avoir lu » que je trouvais un peu cucul. Elle est sortie d’un coup. Et finalement, je me suis dit qu’elle est sortie tellement naturellement que les gens vont l’entendre de façon aussi naturelle.

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– Tes chansons décrivent des images assez crues, de sexe notamment : t’arrive-t-il de t’auto-censurer ?

Jamais. A partir du moment ou on considère que la chanson est un véhicule aussi riche qu’un autre, il n’y a aucune raison. Je ne pense pas qu’un cinéaste de films d’auteur, ou un artiste contemporain doive se censurer. Je trouve drôle dans une chanson très travaillée et léchée d’insérer des mots crus. D’ailleurs, Brel ou Ferré ne se l’interdisaient pas. Je suis de cette école-là. Il ne faut pas avoir peur de citer les choses. Je trouve étrange que dans le hip-hop personne ne se pose la question, alors qu’il y a beaucoup de vulgarité et de misogynie dans les textes. C’est intégré chez ces artistes. J’essaie juste d’élargir le vocabulaire autorisé et de faire avancer la chanson francophone.

– Et sur scène, ton entourage te demande-t-il d’être moins provocateur ?

Non, pas du tout, même s’il arrive de trop parler parfois. On m’a déjà dit : ta gueule ! Parle moins et chante plus ! (rires).

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– Sur « Mon prince charmant », comme précédemment sur « Fier d’être gay », tu évoques ouvertement ton homosexualité : est-ce une forme d’engagement politique ?

J’ai été très choqué par ce qui s’est passé en France avec la manif’ pour tous. Au Québec, je n’ai jamais éprouvé le besoin d’en parler. Je l’ai fait dans le spectacle « Amours, délices et orgues », parce que l’auteur m’a proposé d’aller dans cette direction. Je l’ai suivi ; je trouvais cela intéressant. Au Québec, c’est totalement banal. Je me rappelle quand j’étais coach avec Ariane Moffatt sur La Voix, on était rendus au direct et elle était alors enceinte. Elle a descendu les marches et j’ai tenu son bras, en lui disant : tu te rends compte ! C’est l’émission la plus regardée de l’histoire de la télé au Québec, qui fait 65 % de pdm, pendant toute une saison de janvier à mai, et sur les 4 coaches, l’une attend des jumeaux avec sa femme, et l’autre fait des blagues sur les participants parce qu’il les trouve « cute ». Et bien, on n’a eu aucun message des téléspectateurs à ce sujet. Aucun article ne l’a même relevé. Bref, chez nous, on n’en a rien à foutre. J’ai fait dernièrement une interview avec Christophe Honoré, qui a écrit un livre sur son expérience de père gay, et les horreurs qui lui sont arrivées. C’est fou, on est au Moyen-Âge ! Partant de là, je n’ai pas forcément voulu parler de l’homosexualité dans mes chansons, mais y insuffler du réalisme et ça en fait partie. Consciemment, je suis arrivé au point de vivre ma vie et de m’en foutre totalement : puisque je vis mon homosexualité comme si de rien n’était, il faut que j’écrive comme si de rien n’était. Et puis, il n’y a pas tant de chansons qui parlent d’amour entre hommes. Dernièrement, Bruel est venu chanter Barbara à Montréal, et j’ai trouvé cool qu’il chante « Madame » au féminin ; ça prend un tout autre sens : il a eu raison de ne pas changer les paroles. Qu’on soit gay ou pas, une histoire reste une histoire. J’hésite toujours à en parler, justement pour que ça reste normal et ne pas en faire tout une affaire : vivons-le, un point c’est tout.

– As-tu ressenti des réactions plus nuancées en France ?

Non, mais dès lors que j’en ai un peu parlé, les journaux ont évoqué « mon engagement pour la cause gay ». Ce n’est pas du tout le cas, et les médias ont vite fait de faire des raccourcis : c’est pour cela que je n’en ai pas parlé pendant des années, pour que mes propos ne soient pas déformés et ne pas devenir « un chanteur gay ». J’ai été connu sans que ce soit nécessairement officiel, et d’ailleurs, j’ai toujours refusé d’être porte-parole d’une cause gay, ou de faire la couverture d’un magazine gay. Ce qui est difficile à comprendre pour un Français, c’est qu’à Montréal, ce n’est même pas un sujet : il y a des gays partout et tous les bars sont gay-friendly. Tu te sens chez toi partout ! La France reste un pays macho : comme si l’homme viril se sentait menacé par la banalisation de l’homosexualité. J’ai une théorie sur la question : la place des gays dans une société dépend du statut de la femme dans le pays. Or chez nous, c’est très égalitaire… Si le mouvement féministe n’avait pas été aussi important dans les années 70, les gays n’auraient pas pu trouver leur place dans la société. Et aujourd’hui, les transgenres trouvent leur place grâce au combat des gays avant eux.

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– Tu co-réalises tes clips, dessines tes vêtements, etc : as-tu  besoin de tout contrôler ?

Non, du tout, d’autant que je travaille toujours avec des collaborateurs. J’ai simplement besoin d’avoir une approche globale. Sur « Amours, délices et orgues », j’étais un élément parmi d’autres et je me pliais aux désirs des autres. Faire de la chanson est pour moi un prétexte pour toucher à plein d’autres disciplines artistiques : je suis très proche du milieu de l’art contemporain, de la danse, du théâtre, mais je ne suis rien de tout ça. Mon vrai métier est d’écrire des chansons. Je ne réaliserai pas de films, n’écrirai pas de romans : ma seule forme d’expression est la chanson.

– Tu mènes une double carrière : as-tu le sentiment de devoir adapter ton rapport aux médias et ton comportement en France ?  

Non, la seule différence est qu’à l’annonce d’un concert au Québec, les billets se vendent très vite. Ici, le message passe progressivement. On comprend que ce disque n’est pas le résultat d’un projet d’album, mais celui de toute une vie. Je m’amuse souvent à dire qu’on pourra juger mes disques un par un quand je serai mort, et qu’on pourra les mettre en relation les uns par rapport aux autres. Je tenais ce discours déjà à la sortie de « La forêt des mal-aimés », mais je n’avais fait que deux albums.

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– Il y a eu un avant et un après « Paris tristesse » dans la façon dont tu es perçu ici…

Oui, je l’ai ressenti, et surtout d’ailleurs après la diffusion de l’émission ONPC. C’est une des premières fois où on m’a donné l’occasion de parler. Au Québec, je suis devenu incontournable en télé avec La Voix, malgré mon parcours pourtant très a part : l’album est numéro 1 au Canada sur Itunes, tous classements confondus. Pour un album Francophone de cet acabit, c’est un beau pied de nez. En France, suite à cette émission, les gens ont compris que je suis très cash, que je ne fais pas de fausse modestie et ne cherche pas à être « cute ». Quand Léa Salamé m’a dit que j’avais la grosse tête, j’ai répondu que j’étais juste fier de ce que je faisais, sans tomber dans une espèce de surenchère. En France, ça attaque beaucoup, et on se sent obligé de répondre en attaquant. Il y a beaucoup de joutes oratoires, comme si vous deviez apprendre à vous défendre depuis la petite école. Ca doit dater de la cour de Louis XIV, où il fallait utiliser les images les plus amusantes pour détruire quelqu’un et devenir le petit roi de la cour. Donc, quand j’ai senti que ça prenait cette tournure, j’ai tout de suite coupé court. Et le lendemain, on a vendu 9000 disques. Et puis, le message avec cet album « Paris tristesse » était très clair : un seul type de chansons, avec un seul type d’instrumentations, autour d’un seul thème. Je n’aurais pas fait « Le science du coeur », s’il n’y avait pas eu cet album avant.

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– Tes chroniques sur France Inter en été 2014 t’ont rendu davantage populaire, et permis de faire des duos avec des artistes français…

Oui, bien sûr. C’est drôle, parfois je retombe sur ces chroniques, et je m’étonne moi-même d’avoir dit certaines choses. Je ne réfléchis pas trop en faisant les choses. Je réfléchis après. Mon but était de me familiariser avec le monde de la radio, que je ne connaissais qu’en tant qu’invité ou auditeur. Je me dis parfois que j’aurais du les faire autrement, mais il fallait aller vite. Ce qui est bizarre, c’est que le premier jour de l’émission, les 40 chroniques étaient enregistrées. J’étais au Québec quand la diffusion a commencé, et n’avais aucun moyen de sentir le pouls. Mais aujourd’hui, on m’en parle encore. Sophie Calle m’a dit qu’elle m’avait découvert comme cela, qu’elle m’écoutait tous les matins, choquée ou émue, selon les jours. Personne n’avait fait cela avant, mais je n’étais pas dans mon pays et me sentais totalement libre. Je l’ai fait en totale inconscience.

– Distingues-tu des différences entre tes fans québécois et français ?

Je ne sais pas ; je ne rencontre pas trop les gens. Ici, ceux qui me connaissent ont l’impression d’avoir entre les mains une sorte de secret. Ils sont tout excités avant de venir à mes concerts. Chez nous, je suis plus connu. Mais le point commun, c’est que je sens que je touche les gens, à des endroits où ils le sont rarement, dans leurs coeurs et leurs souvenirs. Ca me fait plaisir parce que j’essaie toujours de trouver le bon angle et l’équilibre entre une esthétique très léchée et quelque chose de très sincère, libre et spontané. Les gens ont une image de moi qui se précise. Avant, la perception était plus floue, et ça m’arrangeait bien, parce que pendant ce temps-là, je me familiarisais avec ce métier. Il existait une confusion encore assez agréable. En France, on n’a peut-être pas encore totalement compris toute la liberté dont je dispose…

– On a découvert plusieurs de ces chansons (« La science du coeur », « Le retour d’un amour », « Alphabet »…) aux dernières Francos de Montréal, où tu as créé l’expérimental « Amours, délices et orgues » : t’attendais-tu à un accueil mitigé ? C’était un spectacle très déstabilisant, y compris pour les fans…

Oui, moi-même, je n’étais pas certain de choses qu’on a essayées. Mais j’ai aimé l’idée que ce soit un point de rencontres entre plein d’artistes et un laboratoire de recherche. J’ai appris des textes, j’ai été dirigé par une grande actrice, j’ai travaillé avec un super chorégraphe, et ça a donné un show qui était tout et n’importe quoi à la fois. Je comprends pourquoi on a aimé ou détesté ce spectacle. Humainement, il s’est passé quelque chose : Matali Grasset, scénographe, et moi, on voulait travailler ensemble depuis longtemps. J’attendais de trouver la bonne formule. Nos démarches respectives ont été en symbiose totale sur ce projet. C’était d’autant plus excitant qu’on l’a fait dans un festival de chanson ; c’est important pour des artistes d’avoir des espaces comme celui-ci. Certains amis artistes en préparation de leur prochain show me disent que j’ai foutu la merde dans leur tête, parce que ce spectacle a cassé des codes. Ce qui m’a fait rire, c’est que pendant la promotion de ce spectacle, certains articles ont écrit : « Pierre nous avait habitués à des spectacles grandioses comme Mutantès ». J’ai montré ça à Philippe Brault, directeur artistique du spectacle, qui m’a rappelé qu’on se faisait démolir. Les journalistes avaient détesté. Le public était divisé, mais je m’en fichais : au moins, ce n’était pas mièvre. Avec le temps, les choses se sont déformées. C’est pour cela que je ne voulais pas qu’on filme ; pour que ça reste dans la tête des gens et que la rumeur, le fantasme autour du spectacle se construisent au fil du temps. Après tout, « Mutantès », et « Amours, délices et orgues » étaient peut-être vraiment mauvais, mais je n’en ai trop rien à foutre (rires).

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– Tu as donné des spectacles quasiment à chacune des éditions des Francos de Montréal : as-tu un projet pour 2018 ?

Je ne sais pas encore, c’est un peu prématuré d’en parler.

– Tu as écrit pour Calogero « La bourgeoisie des sentiments » sur l’album « L’embellie »: comment ça s’est passé ?

Il m’avait vu sur « La forêt des mal-aimés », avec l’orchestre métropolitain, et en avait parlé autour de lui, disant qu’il aimerait que je lui écrive une chanson. Je lui ai envoyé cette chanson qui traînait, pensant qu’il ne l’accepterait pas, vu le sujet délicat pour un chanteur français. Mon écriture est tellement particulière, que tout le monde n’est pas prêt à l’assumer. Il m’a écrit pour la retenir, a retravaillé un peu la mélodie et l’a enregistrée. J’étais super content que ce soit le single de son album Live. Je ne l’ai rencontré qu’une seul fois au Paléo Festival, il y a deux ans. Il me semble très sympathique, très ouvert et brillant. Si tous les chanteurs qui vendent beaucoup de disques en France, pouvaient être aussi riches musicalement… Je ne lui ai pas proposé d’autres chansons, et d’ailleurs, je n’ai pas tant écrit que cela pour d’autres.

– As-tu des envies en ce sens ? Profites-en pour passer des messages…

J’aimerais beaucoup écrire pour Vanessa Paradis, Charlotte Gainsbourg, Françoise Hardy ou Camélia Jordana dont je suis totalement fan. J’aimerais bien travailler avec Fishbach ou Yelle aussi. Il y a tellement de monde… j’ai souvent travaillé avec Albin de la Simone ; j’ai eu la chance de chanter avec Matthieu Chédid, Vincent Delerm, Christophe, autant de gens avec lesquels j’aimerais écrire.

– Quid d’Isabelle Boulay, coach comme toi dans La voix au Québec ?

Une chanson doit être une rencontre : je lui ai proposé une chanson à deux reprises, mais ça n’a pas marché. Et j’ai compris pourquoi en écoutant ses albums terminés : ces chansons n’y avaient pas leur place, ce n’était pas le bon moment. J’ai une écriture avec laquelle les gens ne sont pas toujours à l’aise, et je le comprends.

– As-tu hésité avant d’accepter ce rôle de coach pendant plusieurs saisons ?

Oui, c’est à double tranchant. Il s’est passé quelque chose d’assez extraordinaire au Québec, probablement à cause du producteur Stephane Laporte, qui est derrière tout cela. Avant tout, il est extrêmement amoureux de la chanson. Dans son bureau, il passe en permanence les Beatles, Gilbert Bécaud, Céline Dion, Ariane Moffatt, et il a toujours un regard bienveillant à l’égard de la chanson. Mais j’ai hésité, parce qu’après avoir fait La Voix, tu appartiens aux gens. Tu ne peux plus aller chez l’épicier sans faire de selfies. A côté de cela, j’ai toujours rêvé d’avoir un pied dans la Pop, et l’autre dans une forme plus pointue de culture. J’ai vécu ce grand moment quand Stéphanie Saint-Jean, ma participante, remportait La Voix avec une de mes chansons, alors que j’étais porte-parole pour le Musée National des Beaux Arts du Québec qui inaugurait un nouveau pavillon, construit pour exposer des oeuvres d’art contemporain de ces 20 dernières années. J’étais très fier de flouer les frontières entre ceux deux domaines. J’avais le sentiment de remplir mon rôle. Je ne suis pas issu d’un milieu intellectuel, je n’ai pas étudié longtemps à l’université, mais je travaille avec ce milieu depuis près de 20 ans, parce que je me sens interpellé : la beauté et l’art m’ont un peu sauvé la vie quand j’étais adolescent. J’ai envie de rendre à ce milieu ce qu’il m’a apporté plus jeune.

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– Ta carrière a démarré au grand prix de Granby en 2001 ; aurais-tu concouru à ce genre de radio-crochet plus médiatisé ?

Je ne sais pas. J’aurais peut-être été terrorisé parce que c’est très stressant. J’ai beaucoup de respect pour les jeunes candidats qui concourent dans ces conditions. Mais je l’aurais sans doute fait, parce que j’étais pressé qu’on parle de moi et que ça marche. Je suis arrivé juste avant que la Star Academy ne débarque au Québec. Si c’est bien utilisé, ça peut être très payant. On a vécu au Québec, ce que vous avez vécu ici avec La Nouvelle Star, et la découverte d’artistes comme Camélia Jordana, Julien Doré… La Voix a joué un peu le même rôle. Les artistes qui en sont sortis ont des carrières très intéressantes, parce qu’ils sont arrivés avec des propositions artistiques riches, entre autres parce qu’ils se retrouvaient face à des coaches comme Ariane, Louis-Jean Cormier et moi. Stéphane Laporte a du faire l’effort d’aller chercher des candidats de cet acabit.

– Quel regard portes-tu sur le jeune Pierre Lapointe de l’époque ?

J’avais une telle pulsion de réussir, que je ne me rendais pas compte à quel point je dépassais les limites. J’étais d’une assurance qui me trouble. Rien ne pouvait m’arrêter : j’étais convaincu de tenir quelque chose de puissant entre mes mains, alors que quand je réécoute ce que je faisais, je ne trouve pas cela extraordinaire (rires). Par contre, il devait se passer quelque chose sur scène, parce que les gens sentaient que toute ma vie en dépendait. Rétrospectivement, je ne comprends pas pourquoi les gens m’ont fait autant confiance.

– Quels conseils donnerais-tu à ce débutant ?

Aucun, je lui dirais : vas-y ! Casse-toi la gueule ! c’est tellement instinctif comme métier…

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– On te sent très influencé par la chanson française : as-tu un modele de carrière, des références ? Tu as repris Léo Ferré (« La solitude »,« C’est extra ») par exemple…

Je parle souvent de Barbara. J’ai appris à placer mon souffle en l’écoutant, avant même de savoir que je voulais faire de la chanson. C’est amusant, parce que tous les fans de Barbara ont comme moi l’impression d’avoir un lien intime avec elle. J’aime aussi beaucoup Gainsbourg, Aznavour… Et puis côté québécois, je n’aurais pas fait de la scène s’il n’y avait pas eu Robert Charlebois, Jean-Pierre Ferland ou Diane Dufresne. La connaitre personnellement aujourd’hui et la tutoyer, ça signifie beaucoup pour moi. C’est une très grande artiste qui n’a jamais fait de compromis. L’oeil du public et des programmateurs s’est formé avec ces artistes. Parmi les plus jeunes, Jean Leloup, Daniel Belanger m’ont influencé, et enfin, parmi mes contemporains, je m’inspire du travail d’Ariane Moffatt…

– Il parait que tu as éprouvé ton premier choc musical en écoutant « Si maman si » de France Gall…

Oui, j’avais cinq ans. Michel Berger chantait la chanson sur Télé 5 dans une très grande salle, à Bercy peut-être, et j’ai été saisi. Berger a été très marquant et je l’écoute encore souvent. Un peu plus tard, je suis tombé sur Starmania, et ça a été un vrai choc. Je suis aussi un enfant de Luc Plamondon. Je n’aurais pas fait de la chanson comme cela, s’il n’avait pas existé. Je lui ai dit et je suis heureux d’avoir pu le lui dire directement.

– Sais-tu que Patrick Bruel aimerait reprendre ta chanson pour Elisapie Isaac, « Moi Elsie » ?

Oui, il me l’a dit quand il est venu me voir au théâtre du Rond-Point avec David-François Moreau. Je sais qu’il a été séduit par l’idée de chanter une chanson au féminin. A partir du moment où une chanson existe, elle appartient à tout le monde. J’en serais très honoré en tout cas.

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– Tu chantes « Sais-tu vraiment qui tu es » ; j’ai envie de te retourner la question !

je pense être quelqu’un qui se connait très bien, même si je ne suis pas à l’abri d’un événement qui pourrait bousculer mes certitudes. Pour faire ce métier comme je le fais, il faut être un peu habile avec l’introspection et la remise en question. C’est une chose qui me fascine depuis l’enfance : j’essaie de me situer, de comprendre mes réactions, en allant chercher très loin. Je suis extrêmement lucide, si bien que je peux avoir un regard très sombre, et voir la vie en noir. Mais cette lucidité me conduit aussi à être très positif pour être socialement fonctionnel. J’ai appris à être normal ; c’est tout un travail… (sourire).

Entretien réalisé par Eric Chemouny

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crédit photos :

Photo de couverture JSM 2: (D.R / Columbia / Sony Music France) /  photos Shooting album : John Londono (D.R / Audiogram / Columbia / Sony Music) / Photos des conférences de presse « Amours, délices et orgues » et spectacles aux Francos de Montréal 2016-2017: Frédérique Menard Aubin (D.R / Spectra / les Francofolies de Montréal) / Photos du FNAC Live Festival en juillet 2015 : @I_am_Gregg (D.R / JSM)

2 commentaires sur «  »

  1. Merci beaucoup pour ce très intéressent entretien avec Pierre Lapointe ! Cela permet vraiment d’en apprendre beaucoup sur l’artiste et sa vision du monde, de son art, du monde aussi…ce fut passionnant à lire pour moi qui découvre peu à peu Pierre Lapointe lui-même, même si je l’écoute depuis deux ans !

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